Tour de France 2016 - Etape 3 du lundi 4 juillet, où les "jeunes" sont visés par les "anciens" de 26 ans (Peter Sagan), par Raoul Bidard

Détours en Tour - Etape # 3.

Granville – Angers (223,5 km).

Vingt-deux équipes somnolent. Mais alors… ils roupillent sur leurs bécanes comme on le permettra pas d’un judoka sur le tatami, tous bariolés qu’ils sont de fluo aux marques des sponsors, financiers, maîtres en communication.

Dans ces étapes dites de plat, aujourd’hui, les gars de la pédale disputent un contre-la-montre par équipes côte à côte à peu près 30 km avant l’arrivée.

Inutile de le dire, les jeunes coureurs ne respectent plus leurs aînés. C’est dire ! Maillot jaune encore une fois à Angers, Peter Sagan, un vioque de 26 ans, prend peur des courses menées dans l’enfer de l’avant (France Infos) : « Les coureurs se comportent comme si la vie n’avait aucune importance. En 2010, quand j’ai commencé, les choses étaient différentes. Aujourd’hui, il n’y a plus de respect dans le peloton. Beaucoup de coureurs sont inconscients et veulent juste rester à tout prix dans le train derrière leurs équipiers.  ».

Tout fout le camp. Cinq années sont des années lumières désormais… That’s life in war !

Les deux premières étapes ont été vives, bourrées de tensions diverses : montrer le maillot, mener le train, assurer la visibilité à la télé.

Ainsi, sur les routes de Granville à Angers, quelle surprise !, une trêve a été relayée par la plupart des cadors à leurs lieutenants jusqu’aux gregarios.

Pour le spectacle et un certain honneur pour son art, le Rennais Armindo Fonseca s’est heureusement lancé dans une escapade sans issue. Après des gestes d’interrogation devant le peloton, l’éternel boute-en-train à l’eau claire Thomas Voeckler a pris la poudre d’escampette et est revenu prêter main-forte au gamin. Il s’ennuyait dans l’apathie des jeunes roupilleurs.

Peine perdue. Le peloton en sommeil n’a remis les gaz qu’à 10 kilomètres du terminus pour faire la jonction avec les deux fougueux Français. Sans ces deux-là, merci à eux, l’étape aurait daté l’ennui en un 4 juillet 2016.

Les gros mollets de l’équipe Dimension Data ont offert une seconde victoire d’étape d’un boyau à Cavendish sur ce Tour, la 28ème de sa carrière, à égalité avec Bernard Hinault.

Nous finirons dans les cordes et retiendrons une petite déclaration du patron du Tour, Christian Prudhomme (L'Equipe) : « Si un coureur de 26 ans comme Peter Sagan regrette le cyclisme d’antan, c’est grave ! Mais le peloton est un peu à l’image de la société. ». Il le constate en plus, les chutes en série s’accumulent parce que les jeunes du peloton professionnel ne pensent qu’à eux-mêmes, à leur poire bancaire, à la carrière et la gloriole sur cui-cui et instagram, sans se soucier des autres, des adversaires et même des consignes de sécurité entre coéquipiers.

Il n’est donc pas innocent que, malgré les directions sportives, les motards de la course et de la gendarmerie, les tragédies fusent, comme la mort en mars dernier du jeune Belge Antoine Demoitié percuté par une moto lors de Gand-Wevelgem.

Pour autant, le syndicat des forçats, le CPA (Cyclistes professionnels associés) et les coureurs ont soumis des propositions concrètes pour améliorer la sécurité en course, notamment sur les îlots directionnels ou la formation de chauffeurs et de pilotes moto renforcée. Mais les coureurs, sur le plat, jouent au jeu de quilles. Les frottements épaule contre casque, épaule contre épaule, peuvent mettre à terre dix, vingt, trente coursiers d’un coup.

L’arrivée d’hier à Angers a évité ce piège. Tant mieux pour eux, tant pis pour les images au JT ou les gros titres ce matin de la presse en fureur. Les organisateurs de la grande bouclette de la France de la loi travail de Valls ont opté cette année pour placer une étape de montagne dès le cinquième jour de course, mercredi, entre Limoges et le Lioran, histoire de calmer les plus chauds bouillants et les lever de la selle.

Vivement l’élévation et les cols. Le plat, c’est pas la France, c’est du Hollande !

Debout, main sur les cocottes,

Raoul Bidard