L'opium du peuple, c'est l'élection
La sottise
des peuples.
La soumission en l’idéal politique
est la plus pernicieuse espérance des peuples dans son aspiration au
changement. Le peuple espère en un parti, une coalition de partis et,
majoritairement, il reste à la maison et s’en va déléguer et déléguer encore. De
quel changement s’agit-il ? Les peuples aspirent à quoi de précis ?
Nul ne le sait vraiment, hormis les manifestes et soubresauts instantanés.
A gros traits, aujourd'hui un peuple veut mener
sa barque sans forcément goûter aux joies du voisinage (collègues, populations, concitoyens, pays tiers, continent...). L’état général des
solidarités, masqué par la charité publique et publicitaire, marche au pas de
l’oie. Rien n’intéresse plus nos égoïsmes prioritaires que nous-mêmes. Un tsunami mobilise et s'oublie.
Une élection en Grèce serait,
d’après certains militants de premier plan, un nouveau testament, une nouvelle phase
pour toute l’Europe qui sortirait tout de go de l’ornière des diktats de Bruxelles et
Berlin.
Allons bon… l’histoire récente ne
cesse de nous montrer que les joies instantanées provenant des élections ne
tardent pas à laisser place au dédain. Puis au dépit public.
Les carcans institutionnels sont
tels que les promesses partisanes frottées aux rouages politico-juridiques
institués aboutissent à une gestion tête haute de la crise récurrente des
régimes politiques. Alors le peuple, lui, baisse davantage la tête et ne
s’implique guère plus dans la vie de la communauté politique. L’indécence
serrait de suggérer le contraire.
La crise économique est
consubstantielle à la marche du monde empruntée depuis la fin de la Seconde guerre
mondiale (fin du troisième repartage du
monde), puis lors de l’écroulement des régimes politiques de l’est européen
(révélation du quatrième repartage du
monde). Bien évidemment, l’état de l’esprit des peuples évolue en fonction
de ses élites aux manettes, ses institutions politiques et économiques. Pour le
dire vite, la sélection du personnel politique par l’élection devient ce à quoi
nous assistons ébahis : emprise totalitaire de la communication et
interpénétration des programmes partisans, surtout s’ils s’affichent
antagonistes.
D’autres facteurs, notamment les
nouvelles technologies, hypostasient des comportements pulsionnels
individualistes. Car rien n’a changé avec la modernité libérale : l’homme
se plie à la volonté de puissance et la peur. Telle est la donne ancestrale que
l’on entend dissimuler sous le tapis d'un angélisme programmatique dans la gestion des pays.
Nous le notons par exemple ici, dans L’Atelier
du Serpent rouge, à propos de la société française, la République
angélique a pris la forme d’une soumission aux affaires et aux religions, avec une
laïcité aléatoire et peu défendue dans ses actes juridiques au quotidien. La montée
de l'individualisme corrobore un communautarisme orchestré pour la gestion de
l’impossibilité d’établir une politique nationale et souveraine, ouverte et
validée par une démocratie radicale. Dans ce contexte, l’instruction historique
et civique, plus généralement les programmes de l’Education (ex-)nationale, restent
en panne. Ce contexte est voulu, mais ne s’avoue jamais : mieux vaut « éduquer » de futurs producteurs qu’instruire
de futurs citoyens lucides. Dès lors, des dérives et radicalisations
meurtrières dénudent les plaies sociales du pays entier. Ce n'est pas une
première, ce ne sera pas la dernière. Les actes de Toulouse avaient frappé les
Français... après les 7 et 9 janvier, là, les Français ont été provisoirement sonnés.
Dans le même temps, et malgré
l'illusion facile d'"unité nationale",
la montée des forces politiques extrémistes, y compris au sein des partis de
gouvernement, s'affiche très paisiblement dans les urnes. Comme toujours, les
moutons de Panurge, de gauche, de droite, du centre et de tous les milieux
prétendument éclairés, crient l'irénique "plus jamais ça" pour la millième fois dans une catharsis de
rue sans aucune suite concrète.
Quelques renforcements régaliens ne
réparent en effet pas quarante ans de triomphe de l’individu libéralisé dans la
marchandisation de ses actes et sentiments. Pendant ce temps, l’arrière-ban élitaire
du peuple prépare la prochaine échéance délégataire : l’élection, ce
bréviaire d’autojustification de toute une vie frappée du sceau de l'insignifiance.
LSR
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