Le gauchisme à l'oeuvre, à nos 7 amantes déraisonnables & Olivier ROLIN, par Daniel Michelson
Tigre
en Papier
Ou : fiction-vérité
d’Olivier Rolin au service de l’histoire d’un romantisme gauchiste cultivant le
déni du corps & du beau.
Dans
les années 60 et 70, les organisations gauchistes de tous pays ont attiré une
foule de jeunes gens croyant au « grand soir », cette sorte de
grande nuit de la libération politique & économique du carcan du philistinisme.
Tel le coup de baguette magique d’un temps historique, il en serait terminé
d’une morale bourgeoise étriquée, d’un capitalisme économique aliénant.
Dans
leurs proses & dans leurs analyses, s’appuyant sur une lecture restrictive des
textes révolutionnaires (des anarchistes
aux marxistes), il y eut un engagement corps
& âme dans des regroupements politiques organisés : partis, ligues,
cellules, brigades, fronts, unions de lutte, etc.
La
plupart des militants gauchistes étaient, il faut bien le dire, caractérisés
par un esprit de sérieux doublé d’un
dogmatisme froid à toute épreuve. Ils encombraient leurs discours de plomb
rhétorique d’une idéologie dévoyée, fort éloignée de la dialectique. Liberté &
esprit critique semblaient les oubliés de leur pensum, deux notions très
incertaines au regard des textes des grands précurseurs qu’ils violaient allègrement
sans vraiment les étudier, comme tous « spécialistes » au trop-plein
de livres dans leur chambre, au vide de leurs compréhensions vraies. Il fallait adhérer, &vite. Se fondre dans le
groupe & s’éduquer au contact des chefs, voire se coucher à ses pieds... Pudique,
nous n’en dirons pas davantage, mais les pratiques se jouent encore dans les milieux philosophiques.
Au
plan moral, le conservatisme & le puritanisme goûtaient les eaux
existentielles de chacun des gauchistes, militants obnubilés par la cause d’un
peuple à défaut de la cause d’une humaine condition, comme s’ils avaient décidé
de porter un crédit éternel aux peintures grises du monde de Balzac.
Contrairement
à la vague hippie ou beatnik, il était de rigueur de s’habiller le plus proprement
dans ces groupes gauchistes. Les cheveux courts dominaient chez les jeunes
hommes, les liens & nattes garantissaient les jeunes femmes de conserver le
bannissement social de la femme « en
cheveu ». Pour Alain Krivine,
jeune leader & fondateur en 1966 de la Jeunesse
communiste révolutionnaire, dans son témoignage Mon Mai 68, nous dit très explicitement que les
cheveux courts allaient de soi « pour pouvoir se mélanger aux ouvriers »
& ainsi répandre la « bonne parole ». Sans fard, c'est bien.
Contrairement
à la plupart de leurs contemporains, les gauchistes & trotskystes écoutaient
de la musique classique mais honnissaient le rock, « musique décadente
américaine », tout comme, en guise d’illustration, ils ne fumaient pas
de « joints » : « c’est pas bon pour la
révolution, camarade », insistait Krivine. Depuis lors, ils se sont
largement ouverts à ces « décadences » du cannabis,
& même les défendent bec, ongle & torpeurs programmatiques pour se pencher sur le genre (gender
studies), le sexe pris comme genre, la libération des femmes dans le vaste
marché, le grand « Meetic »
où elles se posent en Colibriam insouciante pour gérer un mâle si profond depuis
Sylvestre le Saint homme. Mais rien dans leurs programmes politiques... toujours le vide béant sur
la sexualité qui reste un sujet tabou dans l’organisation trotskyste présente à
l’élection présidentielle française.
Bien
évidemment, ce phénomène de l’esprit de sérieux révolutionnaire au sein de
cette maladie infantile du communisme, pour plagier la brochure célèbre
du camarade vitamine Lénine, était un trait caractéristique à l’ensemble de ces réseaux &
groupes. Encore plus dans les mœurs pratiquées par les gauchistes français,
allemands & italiens (les plus délurés, les plus orthodoxes, donc les plus manipulés par l'organisation Gladio), sans doute les plus radicaux dans la recherche d’une
morale austère. Le gauchisme a procédé d’un romantisme révolutionnaire froid, disciplinaire & prompt à forger des carrières ultérieures & des suicidés précoces.
Un
roman du romantisme révolutionnaire.
Un
roman rend bien compte de cette trame qui forgea la politique & ses
dirigeants institutionnels jusqu’à aujourd’hui. Le Tigre en Papier, d’Olivier
Rolin, confirme la présence d’une aura
théologique de l’idéologie & de la pratique politique du gauchiste. Un
sectarisme avéré a dominé, des sectes sont apparues. Rolin raconte l’histoire
du célèbre groupe maoïste auquel il appartenait : la Gauche Prolétarienne.
La
lecture du Tigre nous entraîne dans les méandres de la vie des
militants. Tous se surveillent réciproquement. Aussitôt que l’un d’eux faisait
un écart, même le plus léger, d'avec la ligne dictée par le « Grand Timonier » chinois, il
devenait immédiatement « suspect de déviationnisme
contre-révolutionnaire ou petit-bourgeois ».
La
fiction, chez Rolin, sert l’examen d’une réalité qui a vécu & survit encore
dans des traces profondément ancrées dans le discours politique contemporain en
Europe. A un moment, Treize, le meilleur ami de Martin (Olivier Rolin dans le livre), s’autorise une véritable atteinte à
l’ordre moral de la Gauche Prolétarienne. En effet, il se permet une petite
escapade amoureuse au bord de la mer, sous le soleil bas de la baie de Somme,
avec l'avocate du groupe dont ils étaient tous plus ou moins secrètement
amoureux. Quand les camarades apprennent la nouvelle, les délictueux sont
convoqués précipitamment à Paris. Là, ils sont les acteurs coupables d’un
procès politique dans la plus pure tradition des procès de Moscou des années 30.
La condamnation en dit long : ils doivent rédiger leur « autocritique » & le verdict est
sans appel : il leur impose leur séparation sur le champ.
Lecteur
ébahi de telles frasques, nous avions l’habitude de lire de telles anecdotes
dans la presse ou dans les essais historiques portant sur le mouvement ouvrier
des années 60 & 70. Cependant, la force de la fiction & la pénétration du
roman de Rolin nous plongent dans la torpeur dramatique de personnages qui
consentaient à se vêtir eux-mêmes de lourds voiles de laine & de coton
grossier. La plupart des militants du gauchisme, en plein triomphe de
conversions multiples dans leurs rangs, étaient terrorisés par le sexe & le
corps. Une cheville, un bras nu, un cheveu rebelle les anéantissaient dans
leurs convictions théologiques, car cela pouvait les faire dévier de la « vraie voie » politique.
La
beauté : Satan incarné ou l’ironie du faible.
Ainsi,
les gauchistes allaient jusqu’à détester la beauté qu'ils jugeaient illico comme « satanique »
: « Cette méfiance vis-à-vis de la beauté, prélude à la haine de la
beauté, était une espèce de lèpre morale dont nos esprits étaient infestés (...).
Peut-être tout simplement parce qu'elle résiste, la beauté, à cette terrible
volonté de nivellement que nous avions (...). Et la beauté de l'art, n'en
parlons pas. Nous la détestions sans la connaître (...). Un militant ne pouvait
avoir pour amie une fille sur qui les autres se retournaient. » (p.
56).
Reste-t-il
un peu de joie, de détente possible malgré tout ?
Eh
bien non ! De congés et vacances, il était inutile d’en évoquer la moindre
parcelle de possibilité ou d’envie : ce n'était qu'une tradition « petite
bourgeoise » qu'il fallait éviter à tout prix ! Le relâchement de la
tension révolutionnaire, de la concentration dictée par le prosélytisme, était
sujet au relâchement des mœurs. Pensez donc, une semaine d’oisiveté eut pu
mettre le corps à nu devant d’autres corps. Ainsi, les sentiments dominants
chez les militants étaient la mauvaise conscience (se surveiller soi & autrui en permanence), la culpabilité &
la haine de son corps & de ses éventuels travers au regard de la doctrine du
groupe : « un machin hérité du pire christianisme de mortification »,
écrit Rolin. « Il fallait être en guerre contre le plus intime de soi. »
(p. 84).
Il
en allait de même du mensonge & de la mauvaise foi, panoplie si usuelle en
politique : « L'idéologie, c'est la passion du faux témoignage »
(p. 138). Et l’idéologie gauchiste remplace l’amour, l’amour de soi & l’amour
des autres, cette réciprocité permanente & nécessaire pour devenir un
vivant. « C'est sans doute parce qu'on sentait qu'il y avait au fond de
nous quelque chose comme un mensonge qu'on a été si déplorablement obsédés par
la faute, des maniaques de la culpabilité. Et c'est aussi pour ça que
l'instrument de notre punition a été l'ironie : on voulait trop avoir des
destins, eh bien, on a eu des destins de Pieds Nickelés. La tragédie se répète
en comédie, et à trop vouloir du drame on écope d'une farce. C'est l'ironie du sort ».
(p. 173).
On
entretenait, dans les groupements & ligues, le culte des prolétaires. Les
prolétaires avaient forcément raison, alors on se « purifiait de son
éducation bourgeoise » à leur contact, oubliant que le prolétaire se
baignait, prenait parfois des vacances, aimait aller danser aux rythmes des
flon-flon des bords de la Marne qui narrent de belles histoires d’amour entre
un homme & une femme, même (surtout) évanescente.
Certes, le gauchiste se posait tout de même parfois quelques questions quand ils organisaient des « chasses au pédé » pour se défouler, faute de fachos, comme le rappelle amèrement Rolin. Aujourd'hui, c'est l'inverse, on le glorifie à l'excès. Troskos, gauchos, stalinos, même combat que le facho. Point. Des déistes méchants. Point.
A lire cet émouvant roman d’hommes & femmes brisés d’Olivier Rolin, on ne peut que partager & douter d’un même mouvement l’un de ses propos placé dans la bouche d’un personnage : « Heureusement qu'ils n'ont pas pris le pouvoir ! », car on imagine les exactions dans les prairies de rééducation du Larzac ! Moi, Michelson, je soutiendrais volontiers qu’ils l’ont pris ce pouvoir sur nous, dans notre société contemporaine vide & morte. A une nuance près qu’il est discret, sinon dans ses œuvres quotidiennes de discursivités universitaire, politique, journalistique, publicitaire, etc. Le gauchisme, c'est l'UMP, c'est le PS, c'est le PCF, c'est l'ULC, c'est le NPA, c'est le POI, les Verts-de-gris & les organisations cultuelles comme la LICRA, la LDH & j'en passe...
Certes, le gauchiste se posait tout de même parfois quelques questions quand ils organisaient des « chasses au pédé » pour se défouler, faute de fachos, comme le rappelle amèrement Rolin. Aujourd'hui, c'est l'inverse, on le glorifie à l'excès. Troskos, gauchos, stalinos, même combat que le facho. Point. Des déistes méchants. Point.
A lire cet émouvant roman d’hommes & femmes brisés d’Olivier Rolin, on ne peut que partager & douter d’un même mouvement l’un de ses propos placé dans la bouche d’un personnage : « Heureusement qu'ils n'ont pas pris le pouvoir ! », car on imagine les exactions dans les prairies de rééducation du Larzac ! Moi, Michelson, je soutiendrais volontiers qu’ils l’ont pris ce pouvoir sur nous, dans notre société contemporaine vide & morte. A une nuance près qu’il est discret, sinon dans ses œuvres quotidiennes de discursivités universitaire, politique, journalistique, publicitaire, etc. Le gauchisme, c'est l'UMP, c'est le PS, c'est le PCF, c'est l'ULC, c'est le NPA, c'est le POI, les Verts-de-gris & les organisations cultuelles comme la LICRA, la LDH & j'en passe...
Seulement,
au début des années 70, le risque était faible. Rolin reconnaît que lui &
ses camarades avaient le goût de l'échec, qu'ils avaient conscience d'être
« du côté de ceux qui perdent », comme les héros qu'ils
vénéraient, Ernesto « El Che »
Guevara ou Rosa Luxemburg, qu’ils connaissaient finalement bien mal.
En effet, la contrition, la restriction de soi en tant que corps nourrissait une mortification générale : « Faire la révolution, ce n'était pas tellement préparer la prise du pouvoir, c'était plutôt apprendre à mourir » (p. 13), affirme Rolin très tôt dans Tigre en Papier. « Ce qui t'exaltait aussi, penses-tu à présent, c'était la certitude inavouée de combattre pour une cause déjà perdue ». (p. 28). D’ailleurs, nombreux sont les militants qui moururent jeunes par suicide lent dans les drogues dures & l’alcool, par une entrée en délinquance suicidaire où la police servait de corde du pendu. D’autres, un peu moins nombreux, en Italie, France, Allemagne, etc., ont tôt fait de théoriser à l’emporte-pièce le rapt, la liquidation & l’attentat, bien souvent par manipulation avérée de services secrets ou de barbouzes. Surtout, ce sont (encore aujourd'hui) des balances appointées par la police de la CGT, de FO & de l'Etat contre les indépendants & autonomes. Chacun pour soi, Dieu pour rien, la thune pour ma pomme... leur maxime quotidienne.
En effet, la contrition, la restriction de soi en tant que corps nourrissait une mortification générale : « Faire la révolution, ce n'était pas tellement préparer la prise du pouvoir, c'était plutôt apprendre à mourir » (p. 13), affirme Rolin très tôt dans Tigre en Papier. « Ce qui t'exaltait aussi, penses-tu à présent, c'était la certitude inavouée de combattre pour une cause déjà perdue ». (p. 28). D’ailleurs, nombreux sont les militants qui moururent jeunes par suicide lent dans les drogues dures & l’alcool, par une entrée en délinquance suicidaire où la police servait de corde du pendu. D’autres, un peu moins nombreux, en Italie, France, Allemagne, etc., ont tôt fait de théoriser à l’emporte-pièce le rapt, la liquidation & l’attentat, bien souvent par manipulation avérée de services secrets ou de barbouzes. Surtout, ce sont (encore aujourd'hui) des balances appointées par la police de la CGT, de FO & de l'Etat contre les indépendants & autonomes. Chacun pour soi, Dieu pour rien, la thune pour ma pomme... leur maxime quotidienne.
Trente
ans & plus après, certains des membres du groupe de Rolin sont morts, donc,
tandis que les plus malins, souvent d’anciens dirigeants, sont devenus des
« notables roses » friands d'honneurs officiels à rosace &
postes universitaires pour coucher avec quelques thésard(e)s aussi vides de sens
que leurs pauvres proses, & de places chaudes & rémunératrices... pour
que dalle.
Gédéon,
un temps secrétaire de Sartre aux Temps Modernes, le « Grand Leader » de la Gauche
Prolétarienne, est devenu le rabbin charismatique d’une ville de province.
Sans doute est-il le moins cynique de ces emblématiques Timonier de l’Hexagone,
pays du blé & de la vigne, à défaut des rizières entrevues en songes. Gédéon est mort en Israël depuis la parution du roman.
L’alternative
Nord Américaine de « l’idée
internationaliste ».
Le
roman d’Olivier Rolin révèle de longues pages portant réquisitoire sur ses
propres années militantes, cependant qu’il n’en oublie pas moins une foule
d’aspects qu’il juge positifs & ne renie jamais. Sans complaisance pour
autant, il apparaît sympathique & touchant car sincère & modeste. Il
fait preuve de recul & d'humour, surtout lorsqu’il évoque la haine du
corps, d’une cheville femelle provoquant un recul mâle.
Le
rythme de Tigre en Papier est rapide, saccadé comme un tube de rock'n'roll.
Il écrit comme il parle à la fille de Treize, son copain disparu depuis, par
des digressions où il perd le fil puis le reprend. Il ne se ménage ni ne ménage
ses critiques à l’égard de la peur des corps & de la beauté d’un homme, d’une
femme, d’un tableau.
En même temps, Rolin décrit une époque de notre histoire si proche & de ses personnages sans nostalgie, cumulant une certaine affection & tendresse. Il évoque la dimension héroïco-tragique du militantisme gauchiste, toutes ces filles & jeunes gars qui rêvaient d'un grand destin comme celui des résistants sous l'Occupation Allemande (le père de Rolin l'a été, puis a été tué lors de la Guerre d'Indochine ; une partie du livre retrace le parcours du fils entrepris des années plut tard sur les traces du père au Vietnam), ou des grands révolutionnaires. Il met ainsi en avant l'internationalisme qu'il décrit comme « une belle idée ».
En même temps, Rolin décrit une époque de notre histoire si proche & de ses personnages sans nostalgie, cumulant une certaine affection & tendresse. Il évoque la dimension héroïco-tragique du militantisme gauchiste, toutes ces filles & jeunes gars qui rêvaient d'un grand destin comme celui des résistants sous l'Occupation Allemande (le père de Rolin l'a été, puis a été tué lors de la Guerre d'Indochine ; une partie du livre retrace le parcours du fils entrepris des années plut tard sur les traces du père au Vietnam), ou des grands révolutionnaires. Il met ainsi en avant l'internationalisme qu'il décrit comme « une belle idée ».
Mais
n’est-ce qu’une « idée » ?
Ne serait-ce pas plutôt une volonté politique théorique & pratique, en
réalité ? Il est en effet dommage que cet internationalisme ait été si
haineux & dirigé contre toute une partie de la population, les « ennemis
de classe », alors que dans la même période, les hippies pratiquaient
un internationalisme fraternel & sous une forme non-violente (n’est-ce pas Patrice ? Hélas, ils ont
pris le pouvoir à Sciences-po. en relations internationales dans leurs proses sur la mondialisation heureuse) : « peace
and love, flower power, make love not war, tune in, turn on, drop out ».
Naïf
mais exemplaire d’un mouvement gauchiste qui fleurait bon le divertissement
critique outre-Atlantique, & qui n’a guère connu son pareil sur notre vieux
continent plus radical. Cependant que l'héroïsme & l'aventure les
rassemblent, ils ne s'exprimaient pas de la même façon. Bien au contraire. Chez
les hippies, le voyage par-delà les continents, la route, la liberté sexuelle &
du corps, ou le voyage intérieur avec les drogues sont des monnaies de leur
monde libre. Le cynisme y était peu présent, la rencontre du corps & de
l’âme de l’autre plus essentielle : vitale.
Ce qui les distingue dans la maturité des évolutions de chacun pourrait s’extraire du B-A-BA de toute formation gauchiste continentale : apprendre à infiltrer & à diriger (manipuler, devrais-je écrire) les masses. Aujourd’hui, on se teste, on se retrouve à un pot de thèse, sur un site pour « célib’ de Paris XXe », dans un grand catalogue où pécher celui qui me fera un, deux mois de pénétrations ou plus, en attendant celui qui me sera plus utile pour une petite carrière en monteur du court-métrage de ma gloire en 31…
Ce qui les distingue dans la maturité des évolutions de chacun pourrait s’extraire du B-A-BA de toute formation gauchiste continentale : apprendre à infiltrer & à diriger (manipuler, devrais-je écrire) les masses. Aujourd’hui, on se teste, on se retrouve à un pot de thèse, sur un site pour « célib’ de Paris XXe », dans un grand catalogue où pécher celui qui me fera un, deux mois de pénétrations ou plus, en attendant celui qui me sera plus utile pour une petite carrière en monteur du court-métrage de ma gloire en 31…
Les
non-libidoïstes gauchos ont pris le pouvoir.
Beaucoup
de militants ou dirigeants soixante-huitards se retrouvent à pratiquer un grand
écart en essayant de concilier ce qui leur reste de leurs dogmes avec les
réalités actuelles. Ils ont gardé cette rigidité idéologique & ratiocinante
de leurs années de pratique politique, avec cette antienne « tout est politique » assez
réductrice et exaspérante. Ils sont devenus
des membres de la classe dirigeante, politique, morale, arendtienne, économique
& avouent ne point nous aimer
pour développer une telle revanche sur leurs propres idéaux. Cela
expliquerait-il le déni du corps libre & libéré, dans les proses à l’œuvre
des partis politiques institutionnels ?
Tant
il est vrai que s’occuper d’égalité sociale et
professionnelle ou de questions de genre restent des niches rétribuables qui ne résolvent
pas la contradiction fondamentale entre le travail & le capital désincarné.
Ne développons pas les Droits de, de, de… de l’homme… Oui, oui, certes. Une idéologie chasse l'autre.
Cette
ancienne rigidité vis-à-vis de l’amour, de la beauté & du corps, & même
de l’escapade amoureuse, incarnée en puritanisme absolu, montrerait-il ainsi pourquoi
la sexualité libre s’est-elle métamorphosée chez eux, dans les années 80 au
moment de leurs ascensions au pouvoir institué français, italien & allemand,
en pornographie marchande pour mieux
expier leur haine du corps de la femme & de l’homme ? Comme si la
sexualité ne peut être proprement humaine, libre & pleine de la joie de
l’éveil pour devenir aussitôt un commerce, un simple échange putativement
commercialisé. En fait, le marché honni de Rousseau dans son Discours de 1754.
Telles
sont les questions que nous ne manquerions pas de poser à cette génération de
militants ayant cru mordicus en la preuve de Satan dans toute beauté masculine
ou féminine &, au-delà, dans la beauté du monde des hommes, de l’art &
nos dernières maîtresses si tristes des derniers mois, nos maîtresses si
cadavériques… déjà... hélas l’Eau sauvage...
Daniel
Michelson
·
Olivier Rolin, Le Tigre en Papier,
Ed. du Seuil, coll. « Fiction & Cie », août 2002 (ou
Points-Seuil, n°1113, 2003).
·
Pour
en savoir plus sur l'histoire du mouvement gauchiste :
Hervé Hamon & Patrick Rotman, Génération
- Les années de rêve et Les années de poudre, 2 volumes, Ed. du Seuil,
coll. « Documents », 1987
(ou Points-Seuil, n°497-498, 1998)
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