L'euro craque, les peuples raquent, l'histoire bégaie, par Patrice C.
L'adieu à l'image
La pression anti euro s'accentue. "On" ne parle plus que de cela.
"On" n'est pas n'importe
qui, il fait partie des initiés, des discuteurs de salon, des économistes ;
finalement pas de ces "gens qui n'y
connaissent rien". Cela n'empêche pas le doute et d'avoir le sentiment
confirmé de se sentir moins seuls pour les autres.
De fil en aiguille et d'hypothèses en épilogues, on
en arrive donc au consensus mou que l'euro n'est pas, loin s'en faut, la
panacée de l'Europe. La dernière preuve vient d'Angleterre où, parce qu'ils ne
sont pas dans le système euro, les
Anglais voient leur économie s'en sortir mieux que la nôtre. Tout cela parce
qu'ils peuvent dévaluer leur livre-sterling sur le marché international et
retirer les fruits de plus de compétitivité au niveau de leurs échanges. Heureusement
que les Allemands en font encore partie, sinon ils nous toiseraient de haut. Encore
fallait-il y penser quand nous avons décidé d'être membre fondateur et actif du
système européen de Maastricht… Quelques années auparavant, Edouard Balladur
s'était encore permis une dévaluation. La dernière. Aujourd'hui, on réalise que l'identité européenne, qui n'existe pas par
ailleurs, n’existe pas dans sa monnaie. La valeur faciale n'est pas affective…
Célèbre image pour la couverture du LP "Nevermind" (1991) de NIRVANA... une image en dit aussi long. |
L'édifice monétaire craque et prend l'eau de toutes
parts. Les souverainistes se voient confortés dans leurs théories et les
déclinistes disent qu'ils l'avaient vu venir gros comme un paquebot sur un
iceberg, ce qui ne fait pas avancer le navire. Même les dernières coupures en
préparation seraient dépourvues d'identité et de filiations culturelles au
soi-disant profit d'un consensus non identitaire. L'euro appartient à dix-huit
nations, toutes plus indépendantes finalement les unes que les autres et
arc-boutées sur leurs prérogatives. Fin
des frontières et des territoires westphaliens, place à l'improvisation…
L'empirisme des Etats se trouve confronté à la réalité du terrain qui lui n'a
pas le temps d'attendre que tout cela débouche sur des théories mûries ayant
fait leurs preuves. Nous sommes donc dans le vague, dans l'approche encore
approximative des problèmes sans avoir l'ombre d'une solution durable à se
mettre sous la dent, ce qui rassurerait les marchés mondiaux suspicieux et la
ménagère de moins de cinquante ans. Si l'on vendait plus d'Airbus, se
porterait-on mieux pour autant, alors que les industries sont en voie de
disparition totale et que le travail tertiaire n'arrive pas à procurer de
l'emploi digne et pérenne ? Les idées pleines de bon sens n'ont jamais fait bon
ménage avec les théories des Etats, qui sont tellement aventureuses (quand elles existent) que rapidement
abandonnées. Il est vrai que les Etats, entités de plus en plus fantomatiques,
n'ont guère plus que les quelques œuvres régaliennes, donc incontournables, qui
les intéressent : effet d'urgence dans le fait même de simplement exister. Que
voulez-vous qu'ils aillent se fourvoyer dans des considérations d'ordre microéconomique
de l'ordre de grandeur du foyer familial ?
Il est vrai que "ça" pousse très fort à leur porte : ONG, dissidences de tout
poil et contre-champs offensifs se proposent d'œuvrer en lieu et place de ceux
que la démocratie a pourtant intronisés. La direction effective des Etats est
donc à la limite de ce que pourrait être la démocratie directe et du "pousse-toi-de-là-que-m'y-mette" et ce n'est certainement pas le changement ou
le retour à une valeur monétaire identitaire qui pourra faire la différence !
Le retour aux territoires et valeurs associées est sur le point de conclure son
retour. La décantation des pouvoirs et des idées se verra au grand jour, comme
au premier de ceux-ci, et la course à l'identité et aux valeurs "de base" n'aura de cesse que tout
le monde soit représenté à hauteur de ses gesticulations. Les dernières manifestations fourre-tout sont là pour attirer notre
attention sur une recomposition plus fragmentée de l'opinion en mal
d'existence, mais plus que jamais centrée sur soi-même et des vertus, ou
soi-disantes, de ce que peux générer la mutinerie à bord du navire en période
de crise.
On peut toujours nous parler du chômage depuis six présidents
impotents
en la matière, que cela ne suffit plus à mobiliser les croyances en un avenir
meilleur, mais par contre en un devenir incertain et potentiellement dangereux.
Patrice C.
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