Au bon temps des colonies et reniements, par Patrice C.


La démocratie des armes

Encore une fois, la preuve est faite que l'on n'impose pas et n'exporte pas la démocratie, fusse et surtout pour un pseudo bonheur des peuples décidé par devers eux. De même qu'on n'en cautionne pas l'instauration sous l'aspect et au prétexte "bienveillant" de celle-ci.

Il n'y a pas de paix qui s'impose sous la menace des armes. Participer à une pseudo-imposition du bonheur retrouvé sous la pression, c'est ajouter la guerre à la guerre. C'est aussi avouer et reconnaître que la diplomatie est devenue impuissante et que seule compte la puissance d'un Etat qui exporte en rangers ce que d'aucuns ont décrété être le bonheur des autres à l'aulne de leurs propres valeurs.

Avec le temps, nous n'avons finalement rien appris et cela est dramatique, car on continue à perpétrer les mêmes et sempiternelles erreurs de domination et de protection, alors qu’il s'agit en fait de vendre un produit qui s'appelle démocratie. On continue à se comporter en Gaulois sûrs de leur fait en s'étonnant qu'en Afrique ce n'est plus ni l'endroit ni le lieu de propager nos valeurs ancestrales d’Européens. Alors, on y va de notre supériorité militaire d'abord, et surtout avant d'y aller humblement dans le respect de la culture originelle du pays et de ses habitants. L'impuissance des armes sera au moins prouvée, mais empêchera-t-elle que l'on reproduise le même schéma idiot ? A vouloir imposer à l'Afrique la "merveilleuse" Europe, on a pourri le sentiment d'être capable de s'en sortir par soi-même des Africains. A mettre à bas les méthodes spécifiques de gouvernance et de vie des pays d'Afrique, on a créé le besoin d'identification au grand frère qui, malgré ses défauts et son arrogance, restait peut-être la solution la plus simple plutôt que de créer la recherche d'une solution locale. Aujourd'hui, le "grand frère" revient quand bon lui semble ou lorsqu'il représente encore une solution improbable, mais il revient en armes ! Que lui importe l'origine de l'affaire : on lui a demandé d'intervenir, il intervient !

C'est ainsi qu'il se retrouve mêlé à une affaire dont il n'a pas à connaître et qu'il règle à sa façon si peu marquée de discernement. C'est ainsi aussi que, des années plus tard, on s'aperçoit que ce n'était pas La solution et qu'on a fait pire que mieux. Reste les séquelles que l'on n'assume pas et les cadavres dans les placards de la diplomatie d'une pseudo-souveraineté néocoloniale.

Se retrouver au banc des nations, accusé de turpitudes militaro-diplomatiques n'est pas la chose la plus enviable pour un Etat. Surtout lorsque celui-ci se révèle être celui des Droits de l'homme… Avoir le besoin de prouver et de justifier ses actions face à un problème interne à un Etat, c'est déjà avoir un pied dans le doute et dans la suspicion de ne pas être celui qu'on croyait être. Il est très inconfortable d'être mis à l'index et de laisser subsister le doute, mais il est tout aussi impossible de se justifier et de faire retraite sur ses valeurs propres alors qu'on attendait autre chose de votre part. Il faut donc assumer.

Visiblement, ce n'est pas ce qui coûte le plus à un Etat (…) tout occupé qu'il est à continuer de briller à l'international. Les choses étant passées, le reste n'est plus qu'affaire d'historiens. Ce qui signifie qu'on enterre l'affaire et que l'on se dépêche de passer à autre chose. Il est cependant à craindre que cela ne refasse surface, comme c'est le cas pour le Rwanda, et que le mets soit amer. On avait pratiqué de la même façon pour d'autres turpitudes, on n'a d'ailleurs pas hésité à renouveler avec le Tchad et le Mali. On n'échappe pas à une conduite étatique qui s'inscrit dans la continuité de l'Histoire…

Il y a donc bien là nécessité d'envisager de façon durable une conduite qui, à défaut de faire les choux gras de la démocratie-prétexte, soit au moins conforme à l'aspiration des peuples, de se comporter dorénavant en adepte d'un comportement politique revisité. Toutes les enquêtes et justifications n'auront jamais le parfum d'une innocence avérée. Il est impossible pour un Etat de remonter la pente ouverte par une quelconque compromission. Sauf à ne pas tenir compte, de façon prétentieuse, du qu'en-dira-t-on qui colle aux basques, c'est le discrédit et la suspicion qui auront désormais valeur de carte de visite et qui s'inscriront dans la mémoire de l'Histoire. Toutes les tentatives de vouloir continuer à paraître et apparaître ne feront, au contraire, qu'entériner et exacerber le fait que la politique ne fait pas bon ménage avec le bonheur des peuples. Il y a malheureusement loin de la volonté étatique de certains à celle du droit des peuples. La mémoire de ceux-ci ne fait pas bon ménage avec la marche forcée du monde qui est guidé par d'autres impératifs tous plus superficiels les uns que les autres. Nous jugerons sur pièces, avec le temps.

Patrice C.

 

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