Barbecue et Chanel, ou l'instinct grégaire de la reproduction
Guerlain ou barbeuk, les désirs moyens des Français moyens.
Sentir bon en soirée, un appel festif pour tenter la reproduction et jouir de la femme-chose en guise de trophée. |
Au moyen de ce que j’appelle une
douceur, un bel adage latin accompagné d’un chocolat, j’aime à m’aiguiser
buccalement la rondeur des sentiments pour mieux assumer une certaine
connivence avec le monde social réifié. Parler, lire et écrire nous empêche
bien souvent de nous confronter avec la réalité joyeuse d’un monde qui le
serait… nuance parmi la déprime généralisée. Dans la douleur sociale organisée,
il est quelquefois nécessaire d’effectuer des déplacements dans des transports
publics informes, surtout caractérisés par la promiscuité et les odeurs
corporelles mêlées à des parfums de haute tenue et onéreux.
Je le dis toujours aux dames et
demoiselles, surtout si elles sont d’extraction sociale basse ou moyenne (la fameuse classe moyenne), rien ne vous sert de dépenser vos maigres économies avec
Guerlain et Chanel… ce sont des parfums
qui ne vous iront jamais. Pourquoi ? La raison en est simple :
ils sont pensés et fabriqués pour les oisives, les sirupeuses, les alanguies
parmi le pantomime reproductif de tous les conformismes de la paresse
dominante. Ainsi, dames et demoiselles
travailleuses, les essences nobles mêlées à vos sueurs -justement de
travailleuses- altèrent ces précieux flacons; vous dépensez en vain tout en
puant au final. Bien entendu, ceci n’est pas vrai si vous sortez
dîner (évitez le barbecue fatal) ou
si vous destinez votre soirée à une « rencontre
Meetic ».
Je vous écris cela parce que je
constate de plus en plus un commerce fort en vogue de comité d’entreprise pour
obtenir des prix sur ces flacons aux noms évoqués dans les publicités de Canal
et France télé. La masse salariée recherche l’imitation des ors des grandes de
ce monde… Faut en être, une goutte de n°5, c’est croiser Maryline et les
présidents. Résultat, dans les trains, dans le métro, BEURK !
Homme moderne, tu modéliseras toute ton intelligence créatrice par ton souci du salut. Le salut par la grillade, épatant, non ?! |
Fréquentez nos semblables, c’est
devoir marcher parmi des sosies infinis. Tous se griment de la même manière,
tous entendent répondre à l’appel des marques, des enseignes dites de luxe qui
demeurent, à quoi bon l’oublier, l’essence du commerce.
Les parfumeurs et couturiers, par exemple, étendent la manne de leurs bénéfices grâce à la reproduction spectaculaire de produits qui se surajoutent à l’inutile. Ils ont besoin des classes intermédiaires pour continuer à créer des produits encore plus chers aux Chinoises et Qatariennes millionnaires. Exactement comme les sauciers Amora et Heinz, à l’heure du retour des barbecues, le marketing lance des produits colorés et de tous les goûts alors qu’il est si simple de façonner soi-même sa petite sauce avec peu. Mais voilà, l’homme moderne, reproducteur de normes (commerciales) éthérées qu’il place au sommet de ses préoccupations pour échapper au vide neuronal auquel il ne réchappe jamais, veut sans cesse épater la galerie et jouer le rôle de sa vie en toute circonstance : il présentera donc un assortiment de quinze flacons pour filer doux dans le gosier le travers de porc.
Les parfumeurs et couturiers, par exemple, étendent la manne de leurs bénéfices grâce à la reproduction spectaculaire de produits qui se surajoutent à l’inutile. Ils ont besoin des classes intermédiaires pour continuer à créer des produits encore plus chers aux Chinoises et Qatariennes millionnaires. Exactement comme les sauciers Amora et Heinz, à l’heure du retour des barbecues, le marketing lance des produits colorés et de tous les goûts alors qu’il est si simple de façonner soi-même sa petite sauce avec peu. Mais voilà, l’homme moderne, reproducteur de normes (commerciales) éthérées qu’il place au sommet de ses préoccupations pour échapper au vide neuronal auquel il ne réchappe jamais, veut sans cesse épater la galerie et jouer le rôle de sa vie en toute circonstance : il présentera donc un assortiment de quinze flacons pour filer doux dans le gosier le travers de porc.
Plus qu'un art culinaire, un mode d'existence de la classe moyenne qui surjoue "Miami Vice" |
C’est que le barbecue du samedi soir
« entre amis » où on se
bourre de gras et de rosé-pamplemousse pour les dames, est devenu un rituel
américain aussi automatique qu’une giclée de zéros un jour de solde. Les tenues
doivent taper dans l’œil des amis. Plutôt leur en foutre plein la vue… ma
réussite, mon sens des affaires (« ma
chérie, j’ai trouvé ce petit haut moins 30% chez Fabbri. Et toi ? Quoi, tu
l’as payé au prix fort ! Pas de chance… »), mon barbecue tunné, mon jardinet propret, mon salon
de jardin design et ma nouvelle femme
désirable… tellement désirable qu’arrosée de rosé-pamplemousse, elle ira se
faire peloter le derrière par mon pote de vingt ans dans la salle de bain !
Dans les transports publics de
toutes les grandes villes de France, à partir du jeudi soir, personne n’est plus
jamais épargné par les perspectives des beaux week-ends que les Français moyens
se fichent dans la panse en le racontant aux collègues ou à tous les voyageurs par
téléphone : un régal infini. Les banlieusards pavillonnés, c’est barbeuk
obligé... les citadins encore jeunes, c’est soirée petites tenues, parfums et
amourettes recherchées pour rompre une solitude absolue : le sexe du
samedi est la finalité de toutes ces dérivations festives et bien peu gagneront
la partie désirée. La jouissance restera mécanique, rien de bien pénétrant.
Surtout, il faut étaler son insignifiance rétrograde. Le plus possible, à tous…
les réseaux sociaux, la conversation téléphonique, etc., répéter ce que l’on
croit être le « bonheur ».
Pour l’heure, je n’ai pas besoin de chocolat ;
j’aurais juste l’envie d’un thé et un doigt de sourire acidulé posé sur l’existence
moyenne de mes voisins en train. Je lis sans encombre notable, c’est l’essentiel. A l'approche des blanches maisons aux volets marrons multipliées à l'infini entre deux zones commerciales, par les fenêtres du train, des odeurs de viandes grillées et de fumées semblent délivrer l'occupation générale de mes semblables.
LSR
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