Les cas soc' des cas soc', par Patrice


Tous “cas soc’“.

S’entend par là cas sociaux ! Il s’agit de langage parlé, moderne.


J’ai connu une époque, qui commence à dater, où les cas sociaux étaient de pauvres bougres dans tous les sens du terme : économique, culturel, d’époque. Le développement de deux phénomènes constitutifs de notre époque, à savoir la modernité et la misère matérielle qu’elle induit ramène le curseur de l’appréciation au niveau général.

On s’étonnait, voire on se retournait sur des personnes affligées par la misère physiquement apparente ou palpable. Un réflexe dû à l’éducation nous faisait classer la personne en question dans une catégorie préétablie faisant partie de notre culture au quotidien et de nos réflexes sociétaux. On ne s’étonnait pas lorsque, s’agissant de personnes connues faisant référence à une famille, nous y étions confrontés. Il y avait des évidences toutes faites, des situations qui paraissaient inévitables, qui allaient de soi. Des situations quasi normales et passées dans le commun des jours et de notre environnement.

Aujourd’hui, le fossé se creuse selon des axes différents. Il subsiste toujours la misère apparente et de plus en plus présente surtout dans les grandes agglomérations, et puis celle qui est dissimulée, cachée voire ignorée. Etre dépenaillé et d’un aspect physique rebutant n’est que l’aspect visible de l’iceberg misère. La mendicité de plus en plus évidente et incontournable pour certains dissimule cette même misère plus sournoise, diffuse qu’un grand nombre de personnes véhiculent.

Il faut savoir et il serait bon qu’on ne l’oublie pas : nous sommes tous des cas sociaux au regard de certains critères et d’une certaine société.

La misère étagée, cela existe et il s’en faut de peu qu’on vous le fasse comprendre. Il suffit pour cela de sortir du monde dans lequel on se croit à l’abri et où l’on coule des jours relativement heureux pour y être confronté. Oser franchir les frontières de notre quotidien, c’est potentiellement être exposé à un autre monde, inconnu, hermétique où l’on n’est plus le même, les poissons nageant toujours dans les mêmes eaux. C’est ainsi que les mondes sociaux existent sans se fréquenter, au point que l’on n’ose pas les pénétrer. Cela est réciproque de bas en haut de l’échelle sociale mais aussi du haut vers le bas tant chacun dépend d’une échelle personnelle.

Le monde s’est diversifié, spécialisé et refermé sur lui-même. C’est d’une grande quantité de mondes dont est composée la société aujourd’hui et la diversité ne fait qu’augmenter. Ainsi, on sait voir la misère d’une catégorie de personnes en situation d’infériorité lorsqu’on se sait supérieure, mais le supérieur est très relatif. Il y a toujours un supérieur au supérieur précédent. Le salarié nanti d’un salaire et d’un domicile est riche par rapport au SDF, mais ce même salarié est pauvre opposé à quelqu’un d’une “classe“ supérieure ou prétendue telle. Où se situe le pauvre s’agissant du rapprochement d’un employé de base et d’un cadre supérieur ? Où se situe le pauvre entre ce cadre sup et un médecin ? Où se situe le pauvre, la misère entre un médecin et un avocat ? Ces mondes sont hermétiques, spécialisés donc fermés. On est pauvre par le simple fait de ne pas connaître le Code pénal ou celui des impôts. La pauvreté est à relativiser, elle n’est pas que matérielle. Dans un embouteillage en départ de vacances, celui qui roule dans une voiture haut de gamme peut plaindre celui qui roule dans un véhicule bas de gamme s’il est condescendant ou juste réaliser qu’il est mieux loti et qu’il y a des pauvres qui roule en Clio. Le conducteur de celle-ci pourra développer le même sentiment, mais inverse, vis-à-vis du précédent.

Est-ce pour autant que l’on doive en arriver à se piétiner afin de mieux affirmer une supériorité toute relative ? Est-ce pour autant que dans une queue aux caisses d’une grande surface, les pauvres de même extraction et de même condition doivent se chamailler entre eux ? Les riches, eux, ne vont pas dans les supermarchés mais sachons qu’ils ont aussi leur misère relative ! La guerre sociale nous est imposée, sachons ne pas l’aggraver et finir par vivre comme des bêêêtes (*) !

Patrice C.

 

 

(*) lire le texte du 14 juin :


 

 

 

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