MA France pour la vie


La France pour Ma vie & de quelques incorrections de notre temps très vite brossées…

Les valeurs sont des fondements de société, des conceptions abstraites qui tentent de former des axes pour guider une existence personnelle ou conduire une ligne politique. « Nos » valeurs seraient menacées, bafouées, reniées, lit-on.

La France pour la vie, jolie expression, tient du titre bien choisi pour l’ex. Ma France pour la vie, vous êtes tous comme moi, est bien différente de lui.

Ma France à moi est un très jeune homme de dix-sept ans qui meurt avec une Sten dans les bras, en sous-bois en 1942. Lycéen, il tanguait sec entre l’Action française et le communisme international. Il lisait toutes les nuits dans sa cothurne, affrontait ses père et maîtres, mais recherchait surtout sa propre voie ; un fait avéré, il n’a pas craint d'affronter tous les périls en prenant le maquis.

Ma France à moi, bien entendu, c’est aussi Camille en Canadienne élimée, jupe et jambes à l’air été comme hiver, à part ses socquettes blanches, toujours perchée sans repos sur son biclou pour faire passer les messages codés aux groupes du Réseau Jean-Marie disséminés sur tout le Gâtinais, des feuilles de choux politiques, des munitions, un peu de pâté. A la Libération, elle n’a pas cherché comme tant d’autres à accrocher une rosette à son col. Ils furent des centaines de résistants, maquisards pendant que des milliers collaboraient gentiment avec l’ennemi et des millions de pleutres patientaient les yeux rivés sur l’extérieur.

Ma France à moi est une forêt domaniale parsemée de rochers de grès que les dames de la cour de Louis XIV abhorraient quand celles de la cour de Napoléon « le petit » en vinrent à raffoler jusqu’à en installer artificiellement des promontoires pour observer la Merveille. Marcher sur des sentiers ancestraux tracés soit par les carriers, soit par le gibier, demeure une grâce éternelle.

Un peu plus loin, vers le grand Sud, ma France pour la vie est une plage isolée de galets, cernée de hautes parois de calcaire surplombées de conifères oblongs, le long du Gardon de Mialet. A la tombée de la nuit, le méditatif rejoint les stupéfiés d’y entendre le résonnement lancinant des anciens rugissements qui n’ont jamais cessé d’accompagner les sanglantes dragonnades entre chrétiens séparés.

Ma France à moi est une Nationale 7 Paris-Antibes, avec ses droites, ses courbes, une bonne fée bordée parfois de platanes, de restaurants ouvriers ou routiers. On y voyageait avec lenteur, quitte à passer une, deux nuits dans un hôtel villageois. C’est encore la place de l’église de Saint-Pourçain, son clocher majestueux avec un carillon doucereux frôlant sa tour étoilée, ses grandes brasseries éclairées où les bourgeois s’attablent avec les gros fermiers du cru devant la pièce de bœuf, juste avant le pont sur la Sioule.

Ma France pour la vie ne sera jamais un exercice de contrition ou de consensualisme, un vague programme pseudo-politique difformé en plan com’ pour se présenter en interne à une élection dont la plupart de mes concitoyens n’espèrent rien. Pourtant, Fix-Saint-Geneys a beaucoup changé. Ses paysans ont presque tous disparu. Les vaches des habitants ont péri dans les flammes de l’industrialisation. Lointain patrimoine difficilement répétable… qu'en disent-ils nos héroïques permanents de l'inaction politique ?

Ma France pour la vie ressemble à une bibliothèque municipale achalandée de livres de Cicéron, Balzac, Zola, (quelques) Hegel, Kant et Nietzsche... mais aussi du Ganachaud, Mauriac, Bernanos et quelques autres, plus un amas de vieux papiers. A côté, un bouquiniste alcoolo et avare et… surtout, surtout… un lycée François Ier bicentenaire conservé dans le jus des thèmes et versions grecques et latines aux côtés des potacheries sournoises des élèves de math’ élém’ assez basiques, en fait, en comparaison des blagues d’une journée entière des classes philo'.

Un temps politique pas si vieux, les fastueuses années 1990 où on se prenait le Tapie dans la tronche, on prenait à bras-le-corps les « valeurs » et on les collait à tout élémentaire tuyau vaguement républicain ayant un sens peu ou prou collectif. De rares militants s’acharnaient à rechercher une remise en forme de ces valeurs dans les caractères seyants d’une culture commune : il fallait, affirmaient-ils, les inscrire avec douceur et conviction dans le « vivre ensemble » de la société française. Le vivre ensemble, vaste fumette de cannabis entre une carte du PS collée à un timbre menstruel de la CFDT que des clowns se passaient comme le calice suprême en écoutant Renaud chagriné par le Paris-Dakar.

Les commentaires de l’époque jugeaient les valeurs abaissées au sein de la « citoyenneté ». On a donc cru bon de placer cette antienne à toutes les sauces : « citoyenneté dans et à l’entreprise » comme slogan d’une confédération syndicale de pistonnés, « tous citoyens » dans le sport dopé, les commerces de bouche du RPR, les transports publics, le rock marchand, etc.

Au début du second millénaire, la pensée critique s’atrophiant dans la rumination des assemblées représentatives des plus romantiques, les « signes » religieux dans « l’espace public » ont commencé de faire figure de prosélytisme politique, de tord-boyaux pour les gens s'esquintant la santé à coups de signes d’appartenance à une communauté pour se mêler dans l’aventure humaine sans étiquette ni bracelet identifiant.

A l’instar d’une immodération de l’usage de l’absinthe qui a grandement décimé au XIXe siècle toute une population d’artisans, ouvriers et de poètes populaires, leur tuant le cerveau, l’usage des particularismes et de l’infantilisme secoués dans les shakers du communautarisme de genre, de sectes et de la dissolution de la culture souveraine engendrent les mêmes phénomènes de ravages sanitaires parmi les populations franchouillardes. La miséricorde s’est agenouillée devant la puissance de la médiocrité d’une certaine manière de penser le monde dans les rêts des prescriptions de la conformité généralisée.

La pensée louée se présentait « unique », triomphante de l’histoire du socialisme définitivement éteinte, paraît-il, en plaçant petit à petit ses tours de guet autour de chaque notule, de chaque émission ne serait-ce d’un soupçon critique à l’égard de la seule production-reproduction spectaculaire-marchande.

Ma France pour la vie ne possède aucune valeur. Elle réside sous une vieille sépulture juive qui fut profanée à de multiples reprises dans le village d’à côté, depuis tous les derniers conflits ouverts mais dont le granit noir résiste : 1871, quand des cuirassiers Prussiens campaient sur ma terre natale et mettaient à l’amende qui lui refusait allégeance ; 1905 au plus fort des crispations lors de « l’affaire Dreyfus » ; 1936, lorsque des ligues échauffées par la Cagoule permirent l’idée du pogrom ; 1941 par des collaborationnistes en culottes courtes, puis 1944 lors de la retraite d’un bataillon SS ; 1999, puis 2011 quand le retour de la faucheuse fascistoïde a repris ses ambitions sous plusieurs couleurs partisanes (indigènes et islamo-fascistes, séniles avant l'heure et identitaires bas du bulbe). Ma France reste comme cette pierre de granit : dure et droite, jamais concassée entre les bourrins ennemis.

Le temps des reniements suffit, nous en perdons l’âme petit à petit. Une grandeur nous est collectivement nécessaire. De la hauteur de vues et analyses nous obligent à vouloir un capitaine sachant barrer, un guetteur sachant observer, un équipage sachant soutenir ou veiller au but commun.

La France pour la vie sera encore une fois une petite plage de Bretagne où Antoine le marin de Plérin endossera la responsabilité de la survie des chefs de la Résistance en ramant jusqu’au sous-marin Liberté… jamais la France ne chutera sans résister au prétexte de se dissoudre dans des entités supranationales créées de toutes pièces par la cinquième colonne des béats du libre-marché censé apporter bonne fortune à la planète.

Ma France à moi lance un vif & tonitruant, va, couché l’ex !, va, couché… ni toi, ni le casqué de la rue du Cirque ne voulons. Le vote à vit, le vote n’est rien… faux, Lebel, marteau, tout sera bon à empoigner…

LSR

 

 

 

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