Décalage - Volonté colonisatrice des USA, par Patrice C.
Décalage
La volonté colonisatrice des USA
L'hégémonie
américaine n'est plus à démontrer, sauf à ce que ce soit eux-mêmes qui
relancent le sujet, ce dont ils ne se privent pas. Trop inquiets qu'ils sont
que cela leur échappe, ils maintiennent la pression de leur présence tous
azimuts. Qu'importe ce que cela puisse leur coûter, il leur faut être présent,
il leur faut exister. Leur profit se joue à long terme et leur volonté est
inaltérable.
Le
monde entier a depuis longtemps pu constater, avant de le comprendre, que la
présence américaine n'avait bien sûr rien de désintéressée. Une nation "riche" de quelques petites
centaines d'années se trouve bien dépourvue d'histoire face au reste du monde.
La richesse dont s'enorgueillissent et que construisent les Etats-Unis n'a pour
raison d'être que d'acquérir — à défaut
d'en hériter — cette part d'histoire qui constitue un capital sur lequel se
bâtit une nation. Il faut donc, par défaut, acheter ou s'approprier l'histoire
contemporaine.
Faisant
argent de tout bois et quelquefois de tout feu, leur consolidation historique
se perpétue. Suivant le principe, par eux promulgué, que tout a un prix, y
compris le temps qui passe, et que toute création n'a pour finalité que d'être
profitable à la nation, l'investissement globalise tout autant les actes, les
faits et le langage. Le merveilleux livre de Claude Hagège, Contre la pensée unique(*), est à ce sujet une mine d'or à lui
seul.
Le
profit nécessaire, ou voulu comme tel, est considéré comme valeur
d'investissement à long terme et relève de la précaution et de la crainte de
manquer à l'avenir comme on a manqué dans l'Histoire.
Faible sur ses fondations, on ne peut se permettre de rater un épisode, fut-il
historique et susceptible de profiter. Tout devenant spéculation, tout événement
est donc potentiellement objet de profit et requiert donc votre présence. Foin
d'analyses et de précautions psychologiques, il faut parer au plus pressé et
"azimuter" les actions. Le
confort psychologique viendra après. D'ailleurs on l'achètera…
Volonté
donc hégémonique, mais aussi constitution d'un capital historique, culturel, et
appel à la participation de la population sous forme de patriotisme spontané et
entretenu, car il ne faut pas laisser refroidir les ardeurs suscitées et
intéressées profitables à la nation tout entière.
Il en
va ainsi de la présence et de l'innovation qui peuvent même employer les
chemins les plus surprenants de la création que l'on qualifiera à coup sûr de nouveauté. Une nouveauté qui ne sera
rien de plus que de l'audace, car seul paie le pari sur l'avenir. C'est ainsi
qu'émergent des limbes de la création, mais plus sûrement de l'audace et de
l'ambition, des curiosités quelquefois exotiques. Elles relèvent de la novation
et de l'originalité, car il faut aussi investir le secteur de la nouveauté et de la témérité.
"Osez, osez, il en restera toujours quelque
chose !" Ce quelque chose que l'on met bien sûr à profit. En fait, les
Etats-Unis ne sont pas un pays de créateurs mais d'investisseurs, de placiers.
Il ne s'agit pas là d'aventure. Ou alors spéculative.
Ils
nous considèrent avec attendrissement comme des êtres exotiques dans leur
passéisme et leur culte de la culture. De cette culture qu'ils n'ont pas,
qu'ils n'ont pas le temps d'investir sous peine de perdre du temps, donc de l'argent.
Finalement,
de part et d'autre de l'Atlantique, deux civilisations s'observent avec
affection et parfois condescendance. Cela n'est pas méchant.
Patrice
C.
Claude Hagège, Contre la pensée unique, Ed. Odile Jacob, Paris, 2012.
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