"Tu montes, chéri !?" , ou le syndicalisme français en période de chaos
Le syndicalisme des biens-nés & des assis sur le
code.
A
l’invitation de la centrale de Montreuil-sous-Bois, plusieurs organisations
syndicales se sont retrouvées mardi soir pour palabrer sur le projet de réforme
du code du travail des urgentistes au pouvoir. Oui, autour de la CGT, CFDT,
CGT-FO, FIDL, FSU, SUD, CGF, Unef, UNL, UNSA (ils étaient dix ou plus, je ne sais, vous vérifierez mais ce n’est qu’anecdotique)
n’ont produit que palabres pour un minimum syndical sur des points au
final mineurs, face à l’ampleur de la claque que le gouvernement soumet au bon
peuple apathique.
Sur
quoi ? Pour quels effets ?
Une
journée d’action le 31 mars prochain contre le projet de réforme du code du
travail est envisagée à la CGT, histoire de calmer les ardeurs de la base
décidément indocile face à la pratique gnangnan de la gestion au quotidien de la
lutte des places confédérales. Puis encore pour ne pas se laisser non plus
doubler par les initiatives dites citoyennes
et pétitionnaires invitant, notamment, à manifester le 9 mars « avec ou sans les directions syndicales ».
Des
palabres ? Vous ne me croyez pas ? Vous vous dites, allons, le Serpent abuse son monde !?
Rendez-vous
dans vos journaux favoris. Il vous suffit de parcourir très vite le communiqué
de presse diffusé à l’issue du raout syndical.
Cosigné
par tous les syndicats présents, sauf la CGT-FO qui l’a jugé « a minima », ce texte se contente de
dénoncer un « projet élaboré sans
réelle concertation ». Ah ! Terrible constat et tellement nouveau
(sic). Difficile pour les institutionnels
syndics de la crise structurelle du régime d’aller plus loin ensemble.
Certes,
les organisations syndicales représentatives (les OSR des manuels de Droit
social) sont toutes opposées au projet de loi, mais elles se situent à cent
lieues de parvenir à formuler une once d’analyse commune au fond, sur les
motifs et principes à l’œuvre.
CGT,
CGT-FO et SUD entendent que le texte soit retiré. Belle rêverie dans le monde
dur de Hollande et la politique du 49 alinéa 3 de Valls. A la limite, pour
faire bonne figure, je vous le parie là, maintenant, Constitution matérielle
sur table en prime, Valls nous annoncera sous peu qu’il a entendu les acteurs
du « dialogue social » et
cèdera sur des points de moindre importance.
Quoi !?,
vous n’avez pas encore compris ! De nos jours, chez le législateur
urgentiste qui réduit les assemblées et encadre de porte-plumes les « représentants » de la Nation, les
techniciens de la légistique rédigent des textes extrémistes pour aboutir à
faire passer l’essentiel des principes soutenus en interne à l’exposé des
motifs. Tactique on ne peut mieux payante, en effet, depuis le règne de Sarkozy
Ier, il n’y a rien de meilleur que faire joujou avec les « partenaires sociaux ». Une moitié
d'entre eux est achetée par le rouleau compresseur de l’institutionnalisation syndicale (défraiements cofinancés par le patronat,
Légion d’honneur et postes offerts sur la réserve de l’Etat pour les bons…)
et l’autre demeure laminée d’office par une atomisation granitique en chapelles
et sectes sans prise réelle dans le paysage de l’entreprise, des luttes et de
la précarisation des travailleurs.
Résumons-nous.
La CFDT reste à la tête de la réforme. Elle est corédactrice du projet qu’elle
ne vitupéra ô grand jamais. Dire que de bonnes consciences militantes continuent de payer
leurs cotisations chez eux. Intérêt de boutiquiers en interne à leur boîte,
sûrement. Socialisme pété au cannabis idéologique de la fête pour tous,
certainement. En réalité, mardi soir, le communiqué des bronchitiques est clair
là-dessus, ce ne sont que les propositions de barèmes des indemnités prud’homales
dues en cas de licenciement abusif et les dispositifs « qui accroissent le pouvoir unilatéral des
employeurs » qui sont retenus dans la prose syndicale concertée. Quant au reste. Silence ! Couché dans les rangs syndicaux !
On se reverra pour ça dans quelques jours… et toi là-bas, paie ta cotise par internet, tais-toi et marche…
Rien
ne change jamais avec ces lutteurs de la cogestion sociale, ces beaux syndicats
des dégâts qu’ils génèrent en cœur, poing dressé et boutanche de l’autre… cela
fait vingt ans qu’ils nous servent leur soupe
syndicale attentiste. Depuis la défaite historique des luttes de
novembre-décembre 1995 contre la contre-réforme Juppé qui a vu l’intromission
dans la lucarne de Thibault le show man
pour mieux récupérer, dans le spectaculaire, toute la flopée des lois ultérieures
(Fillon et j’en passe sur la Sécurité
sociale) qui vit sans âme qui vive.
Posons-nous
la question franche, directe, fondée sur l’expérience récente : à quoi
sert de proposer une journée d’action le 31 mars, journée « de mobilisation interprofessionnelle et unitaire »,
comme ils disent ?
A
rien, sauf à se rassurer, à se compter, à nous dire que l’individualisme, la
date mal choisie, le foot ou les attentats, le concert de Johnny ou la pluie
ont bouleversé « nos prévisions »
de mobilisation, à moins que « les
Français soient d’accord avec nous par procuration », mais « ils ont peur de perdre une journée de
travail ». On la connaît la rengaine, elle est déjà prête dans les tiroirs
des états-majors. D’ailleurs, cette proposition n’a pas fait l’unanimité. FIDL,
CGT-FO, FSU, SUD, Unef, CGT et UNL partagent « cette idée », nous révèle une note interne de la CGT. Au pays
des idées, ce sont les rois des…
La praxis
révolutionnaire, bouh ! ils ne connaissent
pas.
Chez ces gens-là, on cause du bréviaire du conformisme généralisé la bouche
rosie et mouillée d’aise, petit doigt en l’air, avec en idée le code à la papa
d’antan et la carte syndicale dans le plastron comme on va à la messe avant de
monter le dimanche après-midi se taper une mignonne formée Place du Colonel
Fabien. Une régalade tarifée.
Les
michetons du syndicalisme, faut pas les bousculer, camarades. Plus tu montes
dans la hiérarchie sociale-économiste, plus tu peines à accoupler analyse de la
situation concrète, propagande-action et élucidation théorique. Le pays est en
feu au plan juridique. La précarité du travail est généralisée, elle frappe
jeunes et vieux. En prime, la guerre étouffe les uns et est instrumentalisée
par les autres quand l’autre guerre, la civile
celle-là, guette et prépare ses plombs pendant que nos hiérarques syndiqués se
drapent dans les idées… par la recherche d’une date commune. Eh oui,
Mesdames, Messieurs, une date devient une idée politique. Eclats des rires…
côtes remuées.
Bien
entendu, battre le pavé sera fort utile pour calmer les troupes. Ils
réserveront des bus, prépareront les stocks de merguez et de bières, quelques
calicots pour les couleurs et roulez jeunesse du grand soir,
ce totem des farceurs aux idées trahies, aux luttes entre renégats. Compris :
il est donc si facile d’amuser le bon populo qui, de toute façon, se fout et
contrefout de ce que peuvent bien rédiger au sommet les syndicats.
Ni dans les urnes
politiques, ni dans les urnes syndicales les urgentistes étatistes ne subiront
la volée méritée. A la solde de leurs maîtres, le jeu syndical de dupe se poursuit… désolation à
venir.
Le Serpent rouge
Commentaires
Enregistrer un commentaire