Les dinausores de la lutte syndicale, ou le folklore mémoriel, par Patrice
La France des aigris.
Les Français, porteurs de toutes les qualités liées au
social, au politique, à qui l’on a fait croire depuis les Lumières qu’elles
étaient celles qui guidait le monde, que l’on vénérait et respectait doivent se
faire aujourd’hui la remarque qu’ils n’en conservent ni un grand souvenir ni un
quelconque avantage.
C’est d’un air goguenard qu’ils sont considérés
aujourd’hui par les étrangers qui les visitent. « Ah, oui, Voltaire, la Révolution… Paris, la guillotine ! ».
Après quoi viennent le french cancan
et le libertinage. Une image, équivalente à celle que l’on va nous mêmes
chercher ailleurs lors de nos vacances. Il en va ainsi de tous les pays du
monde d’être marqués par des œillades et des clichés faciles. Toute une mémoire
sociétale réduite à la légèreté.
S’agissant des Français, ils sont eux-mêmes les mieux
placés pour rencontrer ce qui a réellement participé à ce qu’ils sont devenus.
Les vaillants guerriers ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes et c’est en tant
que vaincus par le temps qu’il faut les voir désormais. Les grands mouvements
revendicatifs, combattants ne sont plus que souvenirs. Ce sont justement ces
souvenirs qu’il faut maintenant assumer. Avec qui il faut vivre. Ce sont
certainement eux qui, inconsciemment, génèrent cette amertume, ce ressentiment
que l’on porte en bandoulière, comme une croix et qui, paraît-il, fait ce que
nous sommes et auquel on trouve quand même du charme.
Il n’est que de se rendre dans ce qui furent des fiefs
de la revendication et de la représentation nationale pour constater le
décalage, le gouffre qu’a créée le temps. Des endroits que ne fréquentent guère
les gens de passage et qui, si cela leur arrive, où ils ne remarquent pas des
signes extérieurs ou des comportements qu’il faut être natif pour discerner.
Cela fait parti du “folklore“
national. Il faut bien dire qu’habitués que nous avons été à les côtoyer, il
nous arrive, le temps aidant, de remarquer leur incongruité et finir par être
aussi surpris que les étrangers, à la différence près que nous en connaissons
l’histoire, les origines. Il devient quand même de plus en plus pesant
d’assumer cet héritage. Le folklore, l’Histoire sociale, ça n’a qu’un temps et
ce temps est révolu. Se le voir jeté à la figure dès qu’on pénètre dans un
bureau de poste, dans un hôpital, dans une administration ou dans un taxi, cela
commence à peser et à interférer sur les rapports que l’on est en droit et en
devoir d’avoir au mieux avec ses semblables.
Il est des endroits où la France s’est construite, où
elle a cru en elle. Où elle a imposé des valeurs qu’on nous envie. Les preux
guerriers de 1792, les croyants de 1917 et de 1936, ne sont plus que souvenirs.
Il faut bien l’admettre. Doit-on pour autant continuer à entretenir la flamme
de souvenirs avec lesquels on a vécu et qui ont participé de notre
construction ? On vient quand même plus à Paris pour ses monuments de
pierre et de fer, ses musées et son architecture que pour se replonger dans une
Histoire sociale révolue. Se retrouver face à des sphinx gardiens du temple de
la lutte sociale, c’est faire une plongée quelquefois pénible dans les
souvenirs.
D’avoir gagné le droit de relever la tête fièrement
pour être respecté et faire progresser les droits de chacun doit-il continuer à
être ainsi porté en sautoir ?
Les gardiens de ce qui fut la fierté du pays
peuvent-ils encore se prévaloir d’un passé dont ils ont surtout profité et
qu’ils entretiennent de façon désuète alors qu’ils n’ont jamais eux-mêmes
appartenu au mouvement ?
Gérer un héritage revendicatif donne-t-il le droit de
continuer à se comporter comme une icône ?
C’est pourtant comme cela que le voit encore
aujourd’hui des salariés de la fonction publique (notamment) qui vivent désormais en état de frustration permanente
alors qu’ils ont toujours été plutôt assimilés à la classe moyenne qu’au
prolétariat.
Les syndicats en France ne sont plus guère existants et
leurs actions sont misérables. Le recrutement ne s’opère plus. Les ex-fiefs de
la résistance ouvrière ne sont pas des endroits que l’on est obligé de visiter
au quotidien au fil de ses besoins et les râleurs chroniques et insatisfaits
patentés ne doivent pas être en mesure de nous faire la leçon à toutes
occasions par eux jugées bonnes.
La “résistance“,
aujourd’hui en France, se fait sur le dos des Français. Il y a longtemps
qu’elle ne se fait plus à leurs avantages. Ce qui peut être “drôle“ pour des touristes (?) ne l’est
pas pour les résidents. Le folklore, il y a un temps pour ça !
Patrice C.
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