Croire pour s'imaginer vivre, par Patrice
Fraction de croyance.
Il en va désormais du détournement sémantique des
valeurs essentielles qui fait que cela revêt l'aspect d'un fanion identitaire
que l'on oppose comme bannière face aux différences.
C'est ainsi que l'on peut extrapoler, tout en restant
dans le vrai, que les principes qui nous animent se verront requalifier pour
finir par servir exclusivement ce à quoi certains les destinent, c'est-à-dire
reconnaître leur communauté. Ainsi, Républicains
fera "républicards", démocrates deviendra "démocratards", laïcs est déjà « laïcards ».
Le suffixe en "ar"
semble être celui qui soit le plus approprié pour dévaloriser, voire
ridiculiser les extrémistes ultra conservateurs de valeurs exacerbées, tant il
devient nécessaire selon eux de marquer et de protéger le territoire de chacun.
Il s'agit de pousser jusqu'au point où l'on transforme
des valeurs acquises en références réifiées pour servir la différence qu'on
cultive et se les approprier à des fins identitaires afin de mieux protéger,
croit-on, et finalement isoler les "puristes",
les zélateurs, d'une compromission qui viendrait de la multitude.
C'est l'action d'officiants de canons protégés qu'il
s'agit pour de nouvelles messes, leurs paroles valant, évidemment, évangiles.
Le grand retour du sacré devient un besoin créé de
toutes pièces. Il vient a contrario
de l'usage initial d'idées qui se veulent généreuses et plurielles. C'est d'un
détournement qu'il s'agit aux fins de servir à la protection anticipée de
valeurs alors que celles-ci n'ont pas besoin d'être secourues, possédant en
elles la force nécessaire à leur survie.
La recherche d'icônes n'est pas indépendante de
l'affirmation de plus en plus prégnante, réelle ou illusoire, et savamment
entretenue d'un besoin de messianisme populaire. C'est avouer implicitement que
le politique ne répond plus à son charisme et à son pouvoir mobilisateur,
reconnu et attendu. On finit par avoir les icônes que l'on peut et les croyances qui vont
avec.
Le besoin existe à l'évidence lorsqu'on se reporte à la
désaffection de la politique et ce sont d'autres cieux qui ouvrent leurs
espaces purifiés aux adorateurs en déshérence.
Aussi loin qu'on remonte, l'homme a toujours eu besoin
de croire en dehors de lui à des représentations qu'il voulait parfaites. C'est
de substitution qu'il s'agit.
Les valeurs qui fondent une société étant
inattaquables, c'est de leur transformation en objet de culte pour le plus
grand nombre que doit venir la sauvegarde de l'espèce. Il n'est de protection valable
que divine, il suffit juste de la valoriser selon la demande. Après
cela, apaisé, la multitude pourra se consacrer à son adoration nouvelle et
combattre ses opposants désignés.
Composer, avec des tenants de tels critères
auto-définis, une société apaisée ne semble pas gagner plus de sérénité et
d'osmose.
C'est la croyance qui en sort vainqueur dans une
opposition entre la largesse et l'étroitesse d'esprit et entre la volonté d'être et celle de paraître.
Patrice C.
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