L'Europe, dernière tenancière du surréalisme en art
Le
surréalisme n’est pas mort avec Grisélidis Réal.
L’Europe des droits de l’homme est
une cul-de-jatte. Déambulant sur les trottoirs de la pensée replète d’un triple fond
commun de moralines usées, elle colloque, elle interpelle, elle honnit les adversaires
de la démocratie. Romantique à souhait, elle a pris les rênes de la
consécration ultime du mot piégé : en ultime fille romantique, elle
emprunte les habits déchiquetés de l’humour noir, excédant le romantisme dans
le fiel du surréalisme littéraire. En effet, dernière institution du
surréalisme compassé, l’Europe peine à nous expliquer en quoi sa force réside
en vingt-huit états (sans majuscule), vingt-huit décisions à harmoniser au grain du consensus. Fille
du diable, l’Europe ne peut poser son unique cheville contre un mur, entre deux
passes.
Cadavres exquis, les Etats-membres
de l’UE sont des chiens jaunes… mon image est mièvre, je la modifie : ce
sont des chiens à foie jaune. Ils dînent chaud mais pissent froid.
Ainsi, des embarcations de fortune
font la passe méditerranéenne pour des peuples en fugue. Ces peuples fuient la
misère et la guerre, souvent les deux. L’Italie leur paraît la porte d’entrée d’un
monde merveilleux. Pensez-vous, certains pourront se faire exploiter (pardon : « employer ») à
10 euros la semaine par les néo-négriers de notre monde si moderne, coucher
dans des dortoirs insalubres et manger du ragoût patronal infect pour
entretenir la machine.
A force de claudiquer sur tous les
sujets, le « monde libre » européen
démontre à la fois son inanité institutionnelle et son inefficacité politique.
De déclarations solennelles en
pétitions de principes pour les veaux que nous sommes devenus, voici qu’en bonne
fille, elle se prend (facile) à
pleurnicher sur ses propres impérities structurelles.
Des corps jonchent l’océan, d’autres
corps s’entassent dans les camps de fortune de Lampedusa et, pendant ce temps,
nos édiles continuent d’agir comme si de rien n’était, larme à l’œil gauche (ou droit, selon le vent) en agitant le
spectre de la radicalité extrémiste, dernier avatar de leur communication
politique censée les ramener à la réalité bien comprise par eux et cache-misère
de leurs inconséquences personnelles.
« Bouge de là », chantait le rappeur MC Solaar en 1994. Gentil
poète des sons et mots rimés, ce Claude de prénom saisissait les drames à
venir. Tous d’ailleurs. A croire que seuls nos salariés de la politique n’ont
rien vu, rien compris… à moins que, comme dans le film La Haine, ils se soient dit en leur for intérieur (si intérieur ils possèdent, ce qu’il reste à
démontrer), dans leur chute, « jusqu’ici,
tout va bien, jusqu’ici tout va bien… »… juste avant le scratch final
sur le bitume de l’histoire.
Notre cul-de-jatte ânonne de pieuses
recommandations tel un vague à l’arme dominante. L’Europe n’est qu’une Marie-couche-toi-là, n’en déplaise au
colérique Dany Cohn-Bendit.
LSR
(conscient
d’avoir fait dans le sentimental et
la batavia de l’émotion facile)
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