II- La médiatisation du pouvoir sous l'Ancien Régime (II)


-II-
{Le régime féodal.
Essai de réflexion sur la notion}.

1er § - La notion de féodalité est une forme politique. La qualification d’un régime féodal est nommé comme tel en tant que forme du ou des pouvoirs qui ont été âprement discuté à compter du XVIIIème siècle comme tels. Le régime politique de l’Ancien Régime, en France, a été qualifié ainsi au moment exact d’une rupture dans l’histoire. Lors du Siècle des Lumières se posèrent au royaume de France le besoin de conquérir des idéaux véhiculés par les philosophes et essayistes, les publicistes et quelques juristes : sur la tolérance, sur les libertés, mais aussi sur les vecteurs juridiques de la concrétisation, de l’institutionnalisation du triptyque républicain « Liberté-Egalité-Fraternité ». Or, le féodalisme reste la principale des critiques portée sur l’Ancien Régime. Somme toute, que définit-il ?

2ème § - Par régime féodal, nous qualifions le pouvoir des seigneurs sur ses terres ou sur les terres des personnes qui dépendent d’eux. En premier lieu, la terre est le fondement de toute institution privée/publique, par conséquent pour étudier, cerner et saisir ce qu’est une institution publique d’hier à aujourd’hui, la terre renvoie au droit et le droit renvoie à la terre. En second lieu, nous n’omettons pas que dans plusieurs travaux actuels mal connus, autant en droit public, en science politique et en histoire du droit, la notion de féodalité désigne l'organisation politique et sociale qui se développe après l'échec des Carolingiens et qui trouve son fondement dans ce qu’est le fief, ou plus précisément, selon le point de vue du juriste, le contrat de fief. Quel est donc ce contrat ?

3ème § - Un fief est la concession d'un bien lucratif prodiguée par un seigneur à l'un de ses hommes en rémunération de ses services. Au fil des Vème-IXème siècles, le fief est devenu héréditaire et aliénable, c’est-à-dire pour ce point important, il pouvait faire l’objet d’une cession de droit et était partie prenante du patrimoine du concessionnaire. Le fief a donné son nom au régime parce qu'il a joué un rôle primordial en plaçant la patrimonialité dans toute institution féodale.

4ème § - Aussi, pour reprendre le fil de la problématique soulevée au moment révolutionnaire au sein du royaume de France ouvert dès 1786, la féodalité entraîne atomisation et appropriation de la puissance publique au profit de simples particuliers. Ce sont en définitive les prérogatives féodales qui sont sujettes à caution : lever les impôts, l’impôt du sang (armée), la justice éparpillée entre les parlements, les fiefs, entre les personnes juridiques et institutions primaires, puis entre les prémisses d’administrations (les Chasses & véneries royales, les Eaux & forêts, les Ponts & Chaussée, etc.), l’exercice de la coercition (le pénal), le trésor puis enfin les finances (battre monnaie, puis la monnaie dans les échanges marchands).

4ème § bis - Tous ces éléments forment ni plus ni moins des propriétés objectives qui relèvent des seules prérogatives d’individus. Et d’abord les Grands du royaume, puis les urbains, ce qu’on appelle aussi les bourgeois urbains, les premiers étant, pour le principal, les grands propriétés fonciers. Prosaïquement, aux bourgeois reviennent le chalandage, le commerce et les métiers, et aux Grands du royaume la terre donnée de par les ordres de succession.

5ème § - Le féodalisme dilue la politique au sens strict du politikon aristotélicien, à savoir l’exercice concret et par des processus juridiques de la recherche d’une possible fusion entre la res publica et le bon régime, ou le bon gouvernement. Bref, il s’agit des éléments qui caractérisent dans la pensée politique la notion d’Etat en France. A ce moment, l’autorité centrale sous les Carolingiens ne parvient pas à instituer durablement un roi exerçant pleinement ne serait-ce qu’une autorité nominale sur l’entièreté du royaume. Les fiefs sont des prérogatives des seuls particuliers ; ils en sont les propriétaires et entendent ne pas en céder les dévolutions, prérogatives et privilèges.

6ème § - Par conséquent, le Moyen Age se présente à l’aune de notre synthèse comme une société féodalisée fondée sur la conjonction de règles mêlées de valeurs marquées par les anciennes coutumes germaniques (l’amitié, la vassalité, le serment, le respect de la parole donnée, etc.), le christianisme et la chevalerie et, enfin, des faits sociaux et économiques particuliers.

6ème § bis - Retenez, je vous prie, le fait juridico-politique suivant : la société féodale fondée sur les fiefs de propriétaires assure rivalités et guerres permanentes de ceux-ci pour s’accaparer les terres et prérogatives qui s’ensuivent, cristallisant la pratique récurrente des guerres privées entre seigneurs. Fécondée en premier lieu au cours de l'Empire carolingien caractérisé par un développement des liens personnels, la féodalité va progressivement s’étendre sur tout le continent européen durant les XIème, XIIème et XIIIème siècles, principalement sur les terres anglaises, espagnoles et portugaises. De manière inévitable, les régimes féodaux des uns et des autres créeront là encore des liens de sang et/ou personnels entre systèmes politiques à compter du Bas Moyen Age.

En résumé, le contrat féodo-vassalique est caractérisé par deux éléments : un lien personnel qui unit les deux contractants ; un lien réel en tant qu’il est la traduction par la concession d'un fief, la remise du fief qui devient dès le XIème siècle l'élément principal des relations vassaliques. Ce n’est cependant qu’à partir du IXème siècle qu’on parle de royaume.

LSR

 

 

 

 

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