(3) Les vacances de Lady Lon Solo
{épisode 2}
Melaine, le pantalon déjà baissé aux
genoux, patiente déjà dans sa rutilante berline. Sur fond de Sam Cook poussé en
douce, la fille ne devrait pas tarder. Repérée d’instinct par des années de militance, Melaine l’a converti
de passer vite fait des trépignements insignifiants de la piste vers le parking. Elle
ferait l’affaire pour un job pour suivre des contrats et le calcul des TVA.
Sandrine frappe à la vitre. Melaine
lui fait un signe las de passer par la porte passager. Elle monte. Il lui
propose un joint.
-Non
merci, trop gentil.
-Une
ligne, alors ?
-Pourquoi
pas ?
-Après
la chose ?
-Ok.
-Vas-y.
L’odeur est forte. L’hygiène de
Melaine, entre le sport sur piste, les douches en souffrance, la fumette et le
gin, est loin d’être au top. Sandrine ferme les yeux. Elle voudrait se pincer
les narines, mais l’asphyxie viendrait vite, se dit-elle. Mais elle n’eut pas
le temps du dégoût. Explosion de la vitre de la bagnole. Une fine silhouette tout
en noir attrape l’oreille gauche de Melaine.
-Tu
dois mourir, socialiste de pacotille, patron social pour la galerie.
-Quoi…
non, non, NON, couine le héros local.
-Tais-toi !
Le réducteur de son vissé au Herstal
GP 35 est d’une efficacité redoutable pour casser les dents du gaillard une
fois fourré dans sa petite gueule d’amour.
-T’avais
envie qu’on te gobe, sale type ! A ton tour de tâter de mon engin d’acier.
-Gnna-murfffff….
-Eh,
toi, la pute… sors et oublie vite que tu aurais pu te laisser contaminer par un
porc. Juste lui parler, c’est pourrir sur pied.
La voix de la silhouette en noir est
paisible. Aucune émotion ne transparaît à l’instant. Sandrine quitte l’habitacle,
court se réfugier à l’autre bout du parking. En se retournant, elle a juste le
temps de voir une seconde explosion de lumière et les débris de cerveau se
répandre dans la berline patronale. Crazy
she calls me de Sam Cook continue gentiment.
-J’ai
toujours détestée les chanteurs mielleux, dit la voix
bien plus apaisée en décampant avec cette marche féline des commandos.
*
La Lady arrive au Bon coin. Elle s’assied face à Jésus
Bellegueule, réajuste ses lunettes noires et commande.
-Patronne,
un café. Noir, serré. Et un pain au chocolat, s’il-vous-plaît.
-La
nuit fut bonne Lady ?, tente Jésus hilare.
-Magnifique,
Jésus, magnifique. J’ai pu apercevoir mille étoiles rouges et d’un gris sale neuronal
dans un espace clos… tout un univers de rédemption.
Raoul Bidard
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