L'hôpital (2nd partie), TENON, Patrice C.

Le saint des saints
Patrice C.


Paré à affronter la frontière qui sépare le monde banal des mortels de celui de ceux qui savent et sauvent les vies, je veux parler du bloc opératoire.
En fait, la frontière est vite franchie et peut -comme toutes les frontières- être parcourue en sens inverse. La préparation nécessite les précautions d'usage propre à l'entrée d'un tabernacle. Il faut donc, en amont, avoir pris les précautions et dispositions indispensables à un bon cheminement. Analyses en règles, état général signalé comme OK : on peut prétendre.
Une ultime précaution pas superflue du tout me donne droit à une énième prise de sang au quasi milieu de la nuit précédente. L'embarquement étant prévu à 9 h du matin, le réveil se fait (s'administre) à 7 h 30. Le passeur est travesti en brancardier dûment syndiqué à la CGT, ce qui vaut de l'attente pour régulation et d'avoir des échanges -par moi abrégés- cosmopolites au fil des couloirs, ascenseurs et traversées de cour et de cloître. L'époque est à la restriction tous azimuts, la preuve par l'attente partout rendue inévitable due à un manque de personnel. Quant à l'avenir des services hospitaliers, elle est bien compromise elle aussi par le remplacement d'un actif sur trois partants. Il en va donc de l'efficacité mais aussi du respect d'un ensemble de choses qui précédemment ne posait guère de questions insolubles : plus de cuisine, plus de service d'entretien en propre, etc. On se demande même si bientôt les médecins ne se déplaceront plus que si on les appelle, ou si même ils voudront encore venir exercer leur art dans des établissements qui vont de toute évidence à vau-l'eau. Bien évidemment, moins c'est facile et moins il y a de postulants. C'est donc le malade (que nous sommes tous) qui trinque et l'avenir se présente radieux pour la médecine à deux vitesses. Il suffit de regarder.
L'arrivée en milieu stérile se fait "smooth". On a quitté l'ambiance quai de métro à 18 h, l''espace disponible ne se partage pas avec une quelconque affluence. - Ici, monsieur, c'est sérieux !" Le sas de tri et aussi celui de l'attente (encore). Le volumineux dossier qui vous fait office de passeport se trouve sur votre personne. Il est aspiré comme vous-même dans le passage libéré sous condition et de façon pneumatique. A partir de là, c'est le domaine de la lumière, de la technologie, des modules, des câbles et écrans. Plongée profonde dans un milieu où vous vous retrouvez être la plus petite mais principale partie d'un ensemble.
Les présentations sont d'usage. Si d'aventure, comme cela fut mon cas, vous ne remplissez pas la totalité des formalités à cause d'une responsabilité antérieure qui n'est pas la vôtre, votre cas est interprété, étudié et rejeté ! Vous ne satisfaites pas à tous les critères, votre intervention doit être reportée. Vous êtes un individu décidément pas fréquentable et quoi qu'en aient dites les instances préliminaires, vous ne pouvez prétendre à aboutir.

Rejetés, vous êtes du bloc opératoire avec recommandation de prendre un autre rendez-vous. Remontée en surface dans le dédale des formulaires. Ma vie vaut certes toutes les précautions, mais qui me donnera la bonne clé pour parvenir à me faire soigner ?
Patrice C.
 
 
 

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