"Plus jamais ça" répété à l'infini, par Patrice


Ainsi va l'avenir.

Il m'arrive de rencontrer des gens qui s'étonnent encore du seul chemin possible que l'on s'apprête à prendre, comme de quelque chose d'inévitable et d'incontrôlable. De gens qui ne croient pas au recommencement de l'Histoire et qui pensent que l'avenir ne peut s'inscrire que dans une nouveauté heureuse.

Lorsque j'évoque une évolution vers une nouvelle catastrophe humaine identique à une précédente, on s'étonne de mon pessimisme alors que je vois (pourquoi serais-je le seul ?) se profiler les signes avant-coureurs d'une vaste régression qui ne pourra pas ne pas se produire à cause justement de cet espoir béat que le monde en marche ne peut que progresser vers le bien généralisé, tandis que nous avons, nous vivons déjà au quotidien la preuve même du contraire.

L'Histoire, cette mémoire, a aussi son ADN. Celle qui se reproduit, qui se lègue et à laquelle on n'échappe pas, malgré les croyances fabriquées d'une évolution rédemptrice. Nous avons, contrairement à nos amis animaux, la faculté de nous souvenir, de comparer. Nous avons aussi celle d'oublier, et c'est précisément celle que nous entretenons le plus. Par peur d'abord du passé plus que de l'avenir. Contrairement à ce que l'on dit, ce n'est pas l'avenir qui fait peur, c'est le passé revisité à l'aune du présent. L'avenir, lui, reste grand ouvert sur l'espoir. Béatitude confortable autant qu'invraisemblable, car on sait que l'avenir est inscrit dans le passé. Prétendre, de façon salonnarde et urbanisée, que l'Histoire ne se répète pas est un placebo. Elle repasse les plats et nous sert du réchauffé mais la peur irraisonnée, irréfléchie, spontanée nous fait la rejeter comme une malédiction. Le nouveau totem, car désormais il nous en faut un, réside dans la béatitude sans fond, sans visibilité, de l'avenir. C'est oublier un peu vite que cet avenir ne peut qu'être le fils et le petit-fils du précédent et qu'on le reproduit naturellement. Comment expliquer autrement les situations actuelles ? Plus rien d'autre que scientifique n'est créé. Encore s'agit-il souvent d'une évolution spontanée. Ainsi, les hommes reproduisent-ils leurs comportements et même leurs réactions. Ecoutez-les qui vous disent : "Mais, on a toujours fait comme ça !" De remise en question il ne saurait être question, trop heureux de se reposer sur un matelas de vécu même pas amélioré, et de certitudes confortables et pourtant riches d’enseignements.

Que croyez-vous qu'il adviendra le jour, inévitable, où il faudra pourtant faire le bilan ? Etre amené à constater qu'il faut maintenant être efficace et remettre en question les certitudes hypocrites ? Le jour où les pouvoirs, confrontés à la nécessité impérieuse d'être, devront admettre qu'il n'est que temps de faire ce qu’ils ont différé depuis des siècles, c'est-à-dire agir pour la survie, pour la sauvegarde, car il y a urgence à protéger les acquis et à les maintenir entre les mains de ceux qui justement n'ont rien fait jusqu'alors. Ce changement n'aura rien de réellement progressiste. Il sera avant tout conservateur. Le prix à payer sera librement consenti tant il devient impérieux. A ce tarif-là, il faudra acquiescer car il s'agira de sauvegarde. Le prix à payer sera celui de l'abstinence totale d'initiative privée au "profit" d'un grand décisionnaire apparu comme clairvoyant, comme sauveur. Ce "sauveur" aura pour lui l'adhésion du plus grand nombre tant la délégation, si elle est efficace et démonstrative, aura remportée tous les suffrages et se verra investie du pouvoir d'agir pour le bien collectif nouveau qui ne sera l'apanage que des adhérents passifs qui lui auront délégué leur pouvoir de représentation en même temps que leur anémie, leur passivité et leurs espoirs d'un retour à des valeurs d'Histoire sûres et réconfortantes parce que déjà vécues.

L'avenir est juste le havre de ceux qui acceptent volontiers une domination au profit de leur tranquillité et au détriment d'éventuels aventuriers en avenir, tant celui-ci est suspect car marqué du sceau de la faillibilité et du doute sociétal de voir perdurer une vie sans dignité, sans respect et sans fraternité.

Ne venez pas dire, après avoir ouvert la porte à l’Histoire, que vous ne saviez pas alors que des exemples vécus sont encore présents. D’autres avant nous ont déjà dit : « Plus jamais ça ».

Patrice C.

 

 

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