La société éclatée au présent, par Patrice
Décalage
sociologique.
J'aimerais
comprendre comment il peut y avoir un tel décalage sociétal parmi la population
d'une même société, et surtout comment il peut être aussi (et me semble-t-il) de plus en plus visible.
Comment réussir à continuer de vivre ensemble lorsque des
symptômes flagrants de divergence émergent parmi une population ? Comment, avec des signes extérieurs
aussi évidents de non pénétration d'une couche de la population par l'autre,
continuer à se considérer comme proches et identiques ? Comment faire pour
que cette différence de plus en plus évidente ne devienne pas insupportable aux
premiers qui se refusent à développer un complexe de supériorité et aux seconds
à se sentir diminués vis-à-vis des premiers, ce qui génère une haine douce, rentrée
mais réciproque.
Des signes
extérieurs de différence ne trompent pas aux yeux de ceux qui s'intéressent à
leurs semblables alors que ceux-ci ne se soucient pas de telles questions.
Comment former une société cohérente ? Hors des sentiments réciproques
possibles, hors de la prise en compte de la différence ? L'observation des
autres est aussi une surveillance de soi-même. L'indifférence vis-à-vis des
autres n'est-elle pas une indifférence vis-à-vis de soi-même ?
S'intéresser à l'état général de la société, n'est-ce pas vouloir l'améliorer
pour le bien de tous ? Ne pas s'y
intéresser, ne pas participer, ne pas se soucier du bien collectif, cela
n'exprime-t-il pas la volonté d'indifférence qui peut aller jusqu'à
l'abstraction d'une vie sociale collective ? Insister sur un tel
comportement responsable ne risque-t-il pas d'être perçu par l'autre tranche
sociale comme une intrusion dans la sphère personnelle, et donc d'être rejetée
et jugée comme dérangeante ?
De nombreux
romans ont été écrits qui transposaient le sujet. Cela débouchait
invariablement sur des drames. Mettre ces déroulements sur le compte du roman
est simpliste. Cela sert juste à dire que l'on est conscient et pas
indifférent.
Pourtant, dans
des concentrations urbaines importantes, le sujet est de plus en plus flagrant
aux yeux de certains et toujours pas à ceux d'autres. Le rejet semble être l'attitude majoritaire. Ce que Christopher
Lasch appelle "la guerre de tous
contre tous" favorise la persistance de la différence et profite à des
manipulateurs. La catégorie la plus vigilante est minoritaire et n'est pas
perçue comme porteuse de solutions parce considérée comme intrusive alors
qu'elle est ouverte et consciente qu'une société ne peut pas vivre dans la
haine qui se développe au sein d'une majorité qui refuse toute approche
constructive, analytique et de plus en plus dépourvue de solidarité humaine.
Doit-on en déduire que la haine a trouvé un habitat parmi le plus grand nombre
et que plus ce nombre augmente, plus la haine devient forte ?
D'où vient ce
repli, ce refus de participer et de commencer par se connaître soi-même avant
de connaître les autres ? Le rejet de la part de la minorité de ne jamais
parvenir à inverser les choses ne fait qu'accentuer le clivage et le désintérêt
du plus grand nombre envers une majorité agissante. Cette minorité est jugée
différente et rejetée. Toute tentative est comprise comme condescendante et de
ce fait méprisée.
On sait ce qu'il
en est des majorités manipulées et devenues croyantes en la même chose : elles-mêmes.
Elles finissent toujours par "emporter"
une victoire dérisoire dont elles finiront toujours par être victimes.
Où est le mal ?
Patrice C.
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