Avec Céline Dion, j'aime aimer tellement c'est beau d'aimer


Programmes sous vide.

Vide et Bien font fortune ensemble. La fête qui les réunit souvent s’estompe au profit de larmes toutes commerciales au travers d’une dispense de guimauve chantée ou filmée. Il s’agit avant tout d’une fête inversée destinée à faire vibrer la corde émotive des bipèdes qui recourent aux bons sentiments pour se sentir d’abord vidés puis remplis d’aise à mieux apprécier leur existence terne dans des pavillons acquis à crédits, téléviseurs allumés à proximité de quelques dentelles aux vitres du salon, autrement appelé « pièce à vivre ».

Ainsi apprend-t-on que Céline Dion va diffuser prochainement son opus tant attendu dans les bacs. C’est sain. Au-delà de Céline, tout un espace s’entrouvre.

Céline Dion est à la chanson ce que la grille du loto est au joueur impénitent : une espérance condamnée d’avance. Figure de la sainte cathodique, Céline Dion cultive sa messe dans l’industrie du son et du show à Vegas. Elle brasse nos bons sentiments dans des vocalises improbables, des mièvreries sur l’amour (enragé pour un dollar), tout un consensualisme écœurant possiblement mis en exergue quand on n’a rien d’autre à mettre sous la dent du bon peuple des émus permanents. Michel Drucker est son principal porte-micro en France. Que du bonheur ! (pour reprendre cette insupportable expression des sportifs télévisés). Drucker a tout saisi de l’attente des téléspectateurs des après-midis et des soirées spéciales depuis quarante ans. Il sert de calibrage à la fête.

L’émotion calculée est une industrie de la fête des courbes. Rien ne vaudra jamais de temps à autre un film où la convenance joue sur la rentabilité. Les énervés n’ont qu’à bien se tenir entre deux eaux. Quitte à marier les contraires.

Le spectacle permanent de la vie pourrait se résumer aux programmes TV : des émissions de débats improbables (j’ai trouvé mon fiancé en dansant sur Ze fiesta de Patrick Sébastien dans un squat d’Etretat ; j’ai décidé de m’engager en politique et de ma faire faire un tatouage en écoutant Eva Joly à la radio ; ma mère va épouser l’ancienne épouse de mon père…), de la cuisine pop’, branchée, nouvelle, bourgeoise, jeune, un peu de jardinage bio, Michel Drucker pour le service après-vente de l’armée, de chanteurs et personnels politiques has been et de marins-pompiers, des reportages in situ sur telle brigade des stups dans les « quartiers » (« difficiles », cela va sans dire), des « enquêtes » (le mot met à genoux la critique) sur des crimes non résolus mais dont le présentateur se veut l’auxiliaire précieux des services de police grâce aux téléspectateurs dont certains « savent mais ne disent rien » pour l’instant, de futurs vedettes de la chansonnette ou de la danse où les garçons sont moulés dans des pantalons mauves taille basse, des filles forcément court-vêtues, encore un peu de pâtisserie, de bricolage et cet appartement de nos rêves... et (toujours) le grand retour de Céline Dion. Un match de foot plus tard ou un film un peu érotique, le gogo scotché ira se prélasser en suivant sa série criminelle préférée allongé. Tout rentrera dans l’ordre : au lit ! A la journée suivante…

Le Bien et le Mal en fusion ne nous enlèvent jamais l’impérieux commandement du triomphe du Bien au final. Céline Dion montera en gamme pour nous le rappeler, car l’amour, c’est éternel et tellement beau.

LSR

 

 

 

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