Soyez inutiles, par Patrice C.
Mieux vivre votre vie
J'ai envie de rire. Si vous saviez ce que j'ai envie
de rire… J’ai trouvé la solution en riant, vous le savez bien : des
politiques, des journalistes et autres "public people".
Ce n'est qu'un pis-aller, bien sûr. What's up ? Comme on dit dans le monde
qui lui ne se préoccupe pas de rire et de savoir s'il faut ou pas et pourquoi,
car tout cela leur est étranger. Se poser la question de savoir où,
quand, comment et pourquoi on va rire : c'est déjà désobéir, remonter
le courant, être (se) marginaliser.
Alors, bien sûr, comme je ne veux pas rire tout
seul, comme on en voit quelquefois dans le métro ou dans la rue, car c'est le
signe du début de la fin, je me sers de ce que j'ai sous la main : les
plus visibles, ceux qui s'exposent et tant pis pour eux. Bien que cela leur
convienne tout à fait. Ils préfèrent encore faire rire, car c’est encore
exister un peu. "Plutôt mourir que
de laisser indifférent, que de ne pas exister d'une façon ou d'une autre."
Il n'est évidemment pas question anthropologiquement de savoir pourquoi et
comment. Parce qu'alors là, on n'est plus drôle du tout !
Je le constate à longueur de journée. Des exposés
qui se veulent magistraux, pontifiants et qui sont déjà une fin en soi peuplent
les ondes, les journaux. On vous expose des sujets, des thèmes souvent porteurs
et qui restent creux tant ils ne sont qu'effleurés. On survole, on affiche
sachant que demain une autre affiche couvrira la précédente. Pour ce qui est du
contenu… Ainsi, sur une radio non-stop, on vous parle des nouveautés
technologiques (vaste sujet). On vous
fait faire le tour du catalogue, on vous parle à demi chinois tant on ne
condescend pas (plus) à vous
expliquer de quoi il s'agit, à quoi cela va servir, ce que cela apporte de plus
ou de nouveau. Mais jamais on ne vous dit ce que cela à de nouveau (si tant est) par rapport au déjà ancien
d'il y a six mois !
En fait, ces gens se parlent entre eux. "Allo, les informaticiens parlent aux informaticiens."
Ça n'intéresse que les personnes concernées. Vous, on ne vous dit pas, explique
pas ce qu'il y a de foncièrement ou essentiellement nouveau par rapport à
l'existant. On ne vous a d'ailleurs jamais rien dit sur le sujet évolutif en
diable. Démerdez-vous et faites-vous avoir lors de l'achat ! Il en va ainsi de
tout et ce tout est tellement présent, qu'il devient rien ! Car on n'en a plus
rien à faire. On a fait l'impasse depuis longtemps…
La parole des
politiques, celle des élus, celle des prétendants, aspirants et autres postulants.
ON S'EN FOUT, on vous dit ! Vous êtes dans votre trip, entre consanguins ? Eh
bien, restez-y !
Génial, d'ailleurs, leur attitude en cela que ça
nous débarrasse d'un poids supplémentaire d'obligations et éventuelles
recherches d'intérêt, voire de la peur de rater quelque chose d'important. On
sait que tout ce qui vient de vous n'est pas important, essentiel. Du coup, on
se sent libérés, on peut vaquer à d'autres occupations : expos, discussions,
lectures, cinéma, architecture, curiosités.
Vous nous avez rendu le plus grand service de tous :
nous libérer de votre présence ! On n'en a plus rien à faire et on s'est aperçu
qu'on pouvait fort bien vivre sans vous… Merci ! Vous avez bien fait ! On n'est
plus branché sur vos propres occupations réservées à un usage professionnel ou
politique étriqué.
On respire mieux car on respire plus ! Vous nous
avez rendu du temps. Vous avez réussi à nous dégoûter de vous et de vos visions
et conceptions de bateleurs. On a compris ! La vie peut se faire sans vous… Ouf
!
On a mis du temps, c'est vrai, mais que c'est bon !
Finalement, c'est moins difficile que d'arrêter de fumer et ça rapporte au
moins autant : plus de radio le matin en se levant, plus de journal dans le
métro, plus de discussion technique à la cafétéria… Une autre vie ! On a perdu
du temps, c'est vrai, mais bon… c'est peut-être encore meilleur ! Relire
Philippe Muray, Queneau… Ah, si j'avais su…
Et pendant ce temps-là, vous continuez à mouliner ?
Non ? Je rêve ! Et on vous écoute ? Non ! Vous n'allez quand
même pas croire que vous êtes indispensables ou simplement utiles ?
Cachez-vous !
Vous n'êtes déjà plus là pour personne. Au pire, vous êtes un passage obligé mais aussi
vite oublié, et avec quelle délectation…
C’est ça la non existence ! Car l’inutilité, c’est
justement ce qui est profitable (pour certains comme nous).
Patrice C.
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