Sainte télé, priez pour nous, le journalisme est dans le "voilà" permanent


Je vous salue Télé
pleine de Grâce
l’élection est avec vous
Vous êtes bénie entre toutes les politiques du même
Et l’élu, le fruit de vos entrailles, est béni.
Sainte Télé, Mère de l’insignifiance,
priez pour nous pauvre prêcheur aphone
maintenant et à l'heure de notre démocrassouille.
Amen !

 

Oui, je te salue télé… Terrible, la télécharité passe à autre chose et ne sait plus où donner de la tête de tube.

Des promesses par-ci, des dons souhaités par-là à grand renfort de propagande, des élections, des frappes aériennes, des réformes en vrac… le chaos approfondit la lente litanie de la hiérarchisation de l’information. Dans les rédactions, on sait quoi filmer, on sait quoi écrire. Dans quel ordre ?

Si l’élection régionale est mise en avant du prompteur, l’actualité immédiate n’entraînera-t-elle pas un bouleversement, une chute d’audience « si on est pas dans le coup ». La courbe des ventes des journaux se paie de la bonne photographie insignifiante, du reportage vite-fait, du mythe du scoop comme recherche de tous les JRI, rédacteurs et reporters pour gravir les échelons indiciaires de la profession, de la petite phrase à faire tourner en boucle, du genre « je suis ruiné, RUI-né » (aberration tapienne) jusqu’au flop.

Sait-on jamais, imaginons que Gérard Depardieu exprime son intention de se présenter à l’élection présidentielle. Pourquoi pas ? Scoop toujours !

Une rédaction n’est jamais à l’abri d’un crash aérien. Stoppez tout, arrêtez tout sur le drame, arrêt sur images... Commentaires en boucle, experts en bouclettes aux paroles averties, images en boucle d'empennage dans le sable, trainée de fumée dans le ciel en boucle…

Les chaînes voraces de répétitions en pelotes informes sont capables de vous faire tourner des heures en toupie. Pire qu’un crash, et si François Hollande chutait inopinément dans les sondages ? Ce serait la news du jour. Le subtil, l'improbable... "A la rédac’, on s’en remettrait pas durant 24h. Les annonceurs, mon vieux, les annonceurs…".

Le petit couple de jeunes gens qui se lèvent ensemble à la même heure, bisou-bisou au premier pied posé sur le lino dans l'amour du regard jeté ensemble dans la même direction du téléviseur, comment peut-il s’en sortir dans l’approfondissement de sa compréhension du monde ?

La mémère qui ne voit plus trop bien même avec lunettes, naturellement abandonnée de sa famille sauf pour les étrennes, peut-elle saisir le sens des images et le poids des phrases-choc déversés par une lucarne avide des seules sensations spontanées ?

Quelles activités militantes peuvent-elles émerger chez le chômeur cévenol enfermé dans son studio, sans famille, sans collègues puisque l'emploi là-bas ("mon pauv' M'sieur, le boulot, l'usine, y'en a plus"), télé allumée pour donner un peu de vie dans son quotidien ?

Il n’y a aucune explication viable, aucune perspective clinique à la suprématie prise par le poste téléviseur. Pour cause, le téléviseur n’est plus un objet. Il a dépassé sa valeur initiale de médiation pour parvenir au stade recoupant toutes les caractéristiques de la sécularisation du divin: la religion cathodique.

Laissons nos bons camarades journalistes espérer réfléchir à une « éthique » du métier, une correspondance avec l’engagement.

Laissons nos camarades de La Voix du Nord, du Monde et autres repaires de conscience chrétienne-sociale, s’en prendre au FN… avec des fondements parfaitement fictifs, dans un concert concerté entre Medef, Valls, Madame le ministre de l’Education nationale, Juppé, Cambadélis et Cie sur le seul impair moral d’avec la démocratie télégénique. Avec eux, le FN a de beaux scores en perspective.

Décidément, la farce télévisuelle n’explique jamais rien, ne combat rien, n’engage à rien. Une pure perte de temps. Elle donne à voir logorrhée, redondance et le vide de la pensée unique des gens biens nés et de leurs serviteurs du petit écran dans l'entre-soi, le tout ficelé d'une pincée de sexe, pas mal de sang et du pouvoir en barres aux heures du JT... "Mouais, chef ! faut du pic d'audience, sinon je dégage de c'te rédac !". Rien à tirer de ce truc en tube. Sauf pour un bon film.

La presse écrite entélévisée, de son côté, ne réussit plus qu’une chose : un détournement efficace et généralisé de toute action susceptible d’élucidation… et en avant le chaos tout droit sorti du tunnel d'une histoire subaquatique. Pessimiste ?! Non, lucide, camarade.

LSR

 

 

 

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