DEMAIN LA GUERRE... La protéger, Elle, contre cet état est un défi ! (retour sur les expressions 'temps maudits' et regard)


Demain, la guerre.

Déréliction généralisée en ces temps maudits & gratification de l’espérance en un seul regard déporté sur le vrai.

Nos instincts de libres souverains nous conduisent à hypothéquer le temps et sa vision stoïque la plus indispensable qui soit pour qui ignore une telle décadence.

Il en va donc de nos comportements humains à observer l’humanité de l’homme se déliter dans la bêtise, le fourvoiement salarial et la perte de sens la plus fine. La dilection définit ce sentiment de plénitude de l’être qui accepte ce qui est, ce qui devient. Dans les perspectives les plus classiques des travaux en théologico-philosophie, nous lisons cet examen-là qui envisage l’être comme faisant partie d’un tout de l’humanité et du monde. Ainsi, la perte de sens à l’œuvre depuis des années se mue-t-elle en déréliction ; elle éteint toute sorte d’extase paisible. La dilection peut être alors considérée comme le critère de l’homme réconcilié avec lui-même et l’idée de transcendance. Suffit-elle à expliquer ce qui caractérise notre histoire immédiate ?

  • Retour sur l’expression « Notre temps est maudit ».

A gros traits après les mots d’hier brouillonnés sur « la donne politique et sexualité », ce qui compte pour la modernité est le calcul instrumental et l’esprit de cour doublé de celui de l’esclavage formé par des institutions qui dévoient la démocratie depuis quasiment ses origines. Je ne suis guère en accointance avec Cornelius Castoriadis sur son inspiration de la société démocratique à construire, partant d’un type grecque qui lui tient à cœur. Cependant, chaque jour, nous sommes per()cutés par la bêtise, l’emprunt de toutes les pensées communes, voire toutes les strates de l’instinct grégaire de l’homme : volonté de puissance et peur dominent sous toutes les latitudes bernées par le règne de la marchandise et du capitalisme qui organise son marché, affirmait Henri Laborit à la suite de Nietzsche.

Il revient à Goethe d’avoir affirmé « deviens ce que tu es » quand Nietzsche scandait « deviens qui tu es ». La différence est fondée sur le fait que la force dionysiaque chez l’un est en nous quand l’autre pense à la possibilité de la perfectibilité de l’homme. Cette tension est l’une des clefs de la déréliction, selon moi. Pour autant, je ne suis pas encore parvenu à fixer ce concept et le remettre dans les perspectives du concret.

Notre temps est maudit, dis-je, parce que nous voyons se déliter tout ce à quoi nous avons cru, même avec nos réserves, nos critiques et nos sourires devant les idées, idéaux, organisations et lectures qui, toutes sans exclusive, ouvrent des possibilités, une espérance dans le déroulement de l’histoire en un sens progressiste et un peu plus favorable pour les plus besogneux. Notre classe, la classe ouvrière.

Or, de mois en mois, nous sentons l’accélération de la chute. Quelques-uns l’expriment en la caractérisant de décadence. D’autres encore de mise en périls des institutions. Le couple Hollande-Valls en forme les accélérateurs, bien qu’ils n’en soient pas les responsables : les oligarques européistes sont les coupables. Je ne suis pas éloigné de cette conception. Nos engagements syndicaux ont servi. Mais notre servitude, à cette occasion, bien que limitée par notre esprit libre et souverain, nous a tout même orientés vers le constat de notre échec de notre propre action, de nos propres convictions délivrées oralement ou dans un tract. Notre servitude a marqué le pas dès lors que nous avons vu que la convivialité de l’organisation qui eut pu nous faire tenir n’était plus qu’un leurre. Non pas parce que les militants sont d’indécrottables suivistes de toutes les lignes confédérales hétéroclites, mais par justement notre temps qui les contraint à porter des œillères plus sombres que d’autres pour la plupart, ou pour la clique principale d'entrer de plain-pied dans l’opportunisme et/ou la corruption : un poste, une prébende, un avantage pour roucouler oisivement dans une rédaction finement profilée pour servir de relais aux oligarques et à la publicité.

Lire, écrire, nous intéresser aux choses de l’esprit, de l’histoire et de la création constituent un bienfait. Un bénéfice absolu. En même temps, c’est aussi notre malheur durant des périodes de clairvoyances plus affinées que d’habitude. Pour le dire ces activités de l’esprit nous confinent à la mauvaise heure résiduelle. Si nous propagions une pensée holiste, ce ne serait pas le cas. En revanche, dans des perspectives révolutionnaires, nous sommes des dinosaures. C’est pour cela qu’il faut maintenir la petite étincelle susceptible d’aiguillonner nos futurs agis, ou la résistance possible en cas d’invasion de l’Allemagne autrement qu’avec ses euros, ses créances et ses produits, son idéologie impériale. Viendra le moment de l’éclatement de la fictive paix. A l’extérieur de l’union de l’Europe, à l’intérieur de l’union de l’Europe, tout porte à montrer que le passage est proche de la crise armée.

Comprenne qui pourra. Il est aussi vrai que notre goût pour les choses de l’esprit est malvenu. Il nous consume en lucidité encore plus acérée que nos semblables. A savoir que la simple observation de la société, lire sa presse, écouter ce qui se dit dans le métropolitain ou dans le bus, sont autant d'appréhensions supplémentaires qui confirment nos thèses émises : la guerre prend encore les aspects prégnants de  la guerre de tous contre tous ici et maintenant.

Nous vivons une sale époque, semble découvrir la meute des éditorialistes et commentateurs politiques. Lisent-ils L’Atelier du Serpent rouge depuis des années, comme source cachée ? Fort heureusement, il reste des combattants.

  • Rousseau, toujours !, le promeneur majuscule.

Il n’y a pas de contrat social réel, seule la réelle présence d’un anonyme entraîne la force au débotté d’une rencontre de hasard objectif. Ce n’est plus que fiction le contrat social.

Rousseau désirait rédiger un Traité des institutions politiques. Il ne l’a pas pu. Manque de courage, manque de force, il nous dit aussi qu’il n’était pas suffisamment armé conceptuellement pour ce terrible travail. C’est ainsi qu’il a fait paraître en 1762 son Contrat social dont il n’affirme pas que le contrat est la clef de la bonne sociabilité entre les hommes, entre les citoyens et le souverain institué (les citoyens sont chez lui les véritables détenteurs de la souveraineté). Avec cette fiction, avec son instrumentalisation libérale d’un côté, socialiste de l’autre, le cours de l’histoire politique s’est cru autorisé de suggérer que la fiction est fiction créatrice, tellement créatrice qu’elle en devient réalité.

A force d’y croire, elle l’est devenue. Hélas ! L’assemblée constituante en est la source qui suivit le Serment du Jeu de Paume et demeure la partie perdue : nous, assemblée, nous nous instituons souveraine au nom de tous les citoyens (parce qu’il faut bien des représentants « éclairés » ; certes, ils furent fondés à l’être par les cahiers de Doléances mandés par Louis XVI dans toutes les provinces, les régions, et dès 1786 en son premier mouvement).

Direct, au cœur du malheur fondamental est la question de la représentation qui sert la trahison telle que la conçoit Rousseau.

  • Trahir en politique : la source rampante.

Pour Rousseau, dans le chapitre XV « Des députés ou représentants », Livre III du Contrat social, le représentant ou député revient à livrer les citoyens à y consentir et à en devenir des « esclaves » à s’auto-persuader que la représentation gagne au fondement de la souveraineté ici dévoyée. Rousseau va même jusqu’à soutenir que la morale d’esclave liée à la représentation est le trait commun avec l’argent, la corruptibilité subséquente et, par conséquent reste intrinsèque à la nature du représentant, du député.

Robespierre l’avait si bien compris que la Constitution de l’An III (1795) a été une tentative, par ses conventions (mélange d’interprétation et de pratiques) de rendre le mandat court, simple, révocable. Echec sur toute la ligne et l’Incorruptible est allé à la guillotine sans amertume, certes la mâchoire brisée par ses anciens coreligionnaires.

Rousseau n’a pas cessé de nous mettre en garde contre les "grosses" entités politiques. En Suisse, la constitution autorise une forme de démocratie directe dans les cantons. Par chez nous, on veut l’Europe.

En réalité, il nous revient de procéder à des lectures simples et linéaires de ce que disent les auteurs importants, sans nous éreinter les neurones sur des considérants par trop ésotériques. C’est aussi pourquoi les poètes, quand ils sont limpides, frais et lumineux dans leurs visions, ont cette capacité d’emporter le suffrage populaire. Indre Ady, par exemple, dans l’ancien empire austro-hongrois, a permis de réunir des personnes de tous les horizons pour en finir avec l’impérialisme, le monarchisme despotique. Aujourd’hui, où sont-ils dans notre pays ?

Il en existe, certes, de ces valeureux poètes. Mais le pouvoir a su, avec ses chiens d’éditeurs à sa solde, les réduire à l’atonie généralisée.

Nous sommes tous des acculés victimes de cette atonie, du silence et cette forme rémanente de dolorisme conceptuel et politique. La charité remplace l’orientation sociale des politiques publiques, l’ingérence détruit les souverainetés étatiques et les églises (religieuses et politiques) de toutes les obédiences remplissent leur bas de laine et accentuent l’atomisation des êtres, comme le font les politiques corrompus. Tous! Pas un seul élu n’est indemne de cet état dépravé fait de corruptibilité directe, en argent et biens, ou de corruptibilité indirecte faite de pouvoirs symboliques, de cadeaux, de bienfaits viriles (des amants, des postes, un sentiment élitaire…). Les plus étroitement liés à nos vues sont évidemment ceux du PCF, du PS et des Verts, de toute cette gauche institutionnelle en général qui conserve encore aujourd’hui une prétention à incarner le peuple pour mieux le dompter. Nous partagions quelques-uns de leurs thèmes. Aujourd’hui plus rien. Quant à la droite, nous pouvons en dire la même chose.

Je passe sur le syndicalisme mais aussi sur la presse. Nous avons tant écrit sur eux ces derniers mois.

C’est pourquoi, elles existent et croissent ces périodes malsaines, dangereuses, où tout nous mortifère, où tout nous conduit à songer que nous sommes face à un mur sans échelle, un mur si haut que l’abolition de notre jugement, soudain, nous éteindrait presque l’entendement jusqu’à nous inciter à en terminer, à abdiquer toute espérance par notre travail un tant soit peu animés de fougue. Or, si nous n’abdiquons pas, jamais !, c’est grâce à une conviction : le regard, un certain regard. Alors, après une telle étape survient à nouveau la force. L’esprit du mois de janvier n’est jamais bon après les fêtes. Sans doute le froid orchestré par l’état d’urgence nous sert un manque de lumière et nous abîme l’entendement provisoirement dans cette caserne totale de société que l’on nous bâtit sans que nous agissions vraiment contre. Réside toutefois un mystère de la chimie de nos cerveaux pour renaître : l’amour et la révolution intime.

L’un recommande le repos, l’autre travaille sans relâche en fondant la raison au-dessus de lui-même, s’oubliant, lui ôtant toute réflexion sur lui autre que politique & philosophique.

  • Un seul regard change le monde : ne pas lâcher l’être ultime.

Quelle est la clef, la grille de lecture ? La meilleure est-elle la nôtre ou celle de vieux anciens ?

L’une des clefs est celle de l’ermite en société. J’ai décidé progressivement de me défaire d’une lecture régulière de la presse, de n’écouter les journaux radiophoniques qu’avec parcimonie, de m’abstraire des flux d’informations non réglés, des informations non analysées. La stérilité du temps a ses limites. Je ne reconnais plus la majorité des professionnels de la presse comme étant putativement en capacité d’aligner un propos libre. Ce sont des frappeurs sur clavier, des porte-micros, des femmes sans épaule où les caméras du vide fixent l’œil dévidé du chaos. Face à l’insignifiance des mass-medias, en définitive je ne garantis aucune solution viable.

L’inviabilité de toute solution humaine acceptable doit tenir de la règle à accepter. Accepter le gouffre que constitue le règne de la marchandise a un caractère dolosif. Il nous faut donc nous faire violence à nous-mêmes. Nous déprendre de croire en la bonté humaine. A ce propos, on présente toujours Rousseau comme un doux naïf qui croit en ses propres prémisses de l’homme bon, ce bon sauvage qui se socialise dans la dureté par la société qui lui fait perdre sa bonté naturelle. Voilà ce qu’il faut présenter à la jeune femme inquiète et fatiguée par la société. Car il s’agit non de la rassurer, mais la protéger de toute notre force, à l’aide de toute notre énergie.

Lire Rousseau en toute lucidité permet de prendre en compte que l’état de nature est cet état où les relations sont interpersonnelles dans de petites unités locales, pour lesquelles il n’y a pas nécessité de s’administrer par un pacte. La guerre ou conflictualité particulière étant ce qu’elle est, le pacte en devient la règle normée. Petit à petit, la socialisation appelle la contractualité, le droit naturel en tant que norme a minima commune, jusqu’à ce qu’elle se constitue en tant que ius commune, fait du corpus ius civis (droit civil en quelque sorte naturel, conçu pour régler les litiges et la répartition des biens) & corpus ius canonici (droit du clergé dans les territoires où il a la main temporelle), plus l’adjonction du ius propria (le droit particulier, local, selon telle féodalité, vassalité, d’antan celui des « barbares »). Soyons clair, Rousseau ne croit pas en cette naïveté. En 1762, il est plutôt clairvoyant de ce que peut l’homme avec ses trahisons, qu’il en devient irascible. Plus qu’avant. Cela confine même à la paranoïa. Il s’exclut. Il devient l’ermite d’Ermenonville. Il s’arrange de ses contemporains, écrit et herborise. Il renonce à ses Institutions politiques mais il a fait œuvre.

Toujours dans Le Contrat social, le chapitre XV du Livre III est un texte court et dense dont j’invite les inquiets à relire. Savoir la vérité apaise… une vérité sur le représentant et l’esclavage, une vérité sur la morale d’esclave de tout à chacun face au député, une vérité sur la « célébrité » de passage.

Alain (Emile Chartier) peaufine ces propos dans le droit fil de cette filiation de conviction. Nous défaire de nos propres liens est un combat de tous les jours. Nous n’en finirons jamais de cet état de délaissement, parfois d’abandon d’avec le monde. Nous sommes faibles avec la réalité, parce que nous restons forts avec la lucidité. Cette lumière qui éclaire d’abord, cette lumière qui finit par brûler la rétine.

  • Résister, c’est la protéger, elle !

Ainsi, lecteurs, vous comprenez la passion épistémique, celle de ces rares chercheurs déraisonnables qui fuient le monde de la quotidienneté. Ils embrassent toute la vie dans la plénitude de l’existence et savent se reconnaître au premier regard franc, puis au second qui lui est oblique.

Vrai, nous connaissons enfin ce que sont les hanches du grand monde pouvant enfanter les meilleurs qui nous suivront, et je me sais saisir la violence des tourments de tous nos contemporains.

Sans doute est-ce la première prise d’arme du résistant contre l’imminence de la guerre : savoir, étudier et protéger le regard ultime n’est rien d’autre qu’un seul et même mouvement. La somme d’être, pour sûr ! N'aimer qu'elle, bien entendu, mais le taire  sous les flots scripturaires finalement rédigés pour elle seule. Elle est...

LSR

 

 

 

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