(4) De la politique à l'amour - un point sur Balzac (4)
Donne politique et sexualité. Quel rapport ? (4)
Balzac est l’un des rares écrivains
à savoir lier politique et sexualité. Certes. Mais il s’agit en premier lieu
d’une peinture des mœurs parsemée de colories sociales, façonnée à l’aide des
pinceaux de l’histoire institutionnelle, économique et politique. C’est une
fiction plus vraie que la réalité, car elle s’observe encore sans lieu, sans
date dans tous les milieux similaires. L’ancien vermicellier, travailleur
énergique, fondait son ascension dans la privation personnelle et la valorisation
de ses antiennes intimes formulées dans le travail et la famille. Goriot est le
« Christ de la paternité ».
Tout, tout faire pour ses filles qui
ne lui rendraient jamais allait devenir sa croix : mariages vénaux ou pour
un titre, marivaudages actifs pour imaginer échelonner l’ivresse sociale du
« grand monde »,
instabilité et asthénie comme mode de vie entre une demi-mondanité pour gens de
peu puis un bal du « Tout-Paris »,
voilà que les biches dorées qui n’ont jamais rien fait de leurs dix doigts,
sinon s’avérer même pas de bonnes maîtresses au lit, flirtent avec l’esprit
d’un temps de dépression dans les idéaux de l’économie politique.
Marx, Lukacs sont des admirateurs de
Balzac. Sa bonne amie, Laure de Berny, dite « la Dilecta », qu’il peint dans Ursule Mirouet (1841-1842), superbe roman balzacien de l’amour, se
déroule à Grez-sur-Loing, là où Laure possède son logis, La Bouleaunière où elle est passée de vie à trépas en juillet 1836,
et Nemours où Balzac séjournait, laquelle ville en bord de Loing le séparait de
plus de cinq kilomètres de Laure et qu’il ralliait chaque jour d’un pas ferme
en agité du cœur émulateur. Sacré Honoré. Petit roman peu lu, presque jamais en
fait, il est l’un de ses textes qu’il consacre aux « Scènes de la vie de province ». Il y examine l’éducation, le
spiritisme, les forces occultes et les oraisons pour l’au-delà sous les formes
les plus usuelles en son temps (la
métempsycose telle que conçue à la mode antique), les héritages, les
margoulins du notariat, les chantages et vastes conflits entre héritiers. Vous le
savez, Laure de Berny est aussi dépeinte à travers le personnage de la Duchesse
de Langeais (1833-1839) avec une autre courtisane, ce qui n’a pas manqué de lui
déplaire. Sauf que Balzac s’en servit pour modèle uniquement physique ; il
lui fallait montrer une sourde beauté aussi discrète qu’aimable dans ses traits
en contrepoint d’une légèreté désinvolte (c’est
là pour modèle la duchesse de Castries). C’est pourquoi Balzac rénove sa
première version du texte trois ans après la mort de Laure, pour aller dans le
sens d’un respect éternel.
(à
suivre)
LSR
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