(6) De l'amour à la politique - Retour sur Platon & Rousseau médiés par Castoriadis (6)


Retour par Castoriadis sur la donne politique et sexualité. Quel rapport ?

La société est totalité effective. C’est un fait indiscutable que la science politique et la philosophie politique démontrent d’un seul mouvement.

Cornelius Castoriadis a lui aussi postulé cette évidence que nous partageons. Dès lors, nous allons recourir à lui en dénichant une citation explicite pour examiner en quelques mots clairs ce qu’il reste à faire.

En effet, il nous semble impérieux de raisonner politiquement en des termes de transformation radicale de la société pour que sa direction dans l’histoire et sa réorganisation s’inscrivent par une réinstitution globale et radicale, c’est-à-dire pour que les individus aspirant à l’autonomie visent à une volonté globale leur donnant l’occasion d’interpréter quelques expériences social-historiques comme des révolutions effectives tout en tenant compte des institutions, des mœurs et des questions sociales qui les conduisent à l’acte révolutionnaire.

L’expression notionnelle de transformation radicale n’est pas le nihilisme, ni la caducité d’une révolution totale, encore moins faire table rase de ce qui est, mais relève davantage de la tradition suivie par Platon comme Rousseau que nous citions abondamment dans nos bricoles précédentes.

Pour cette tradition d’analyse, il ne peut exister d’institution politique et sociale sans qu’elle ne soit directement reliée à la totalité des infrastructures économiques, de la structure anthropologique, sociale et psychique des individus existant sous l’autorité de ladite institution, ita est les mœurs exprimées aisément dans la sexualité. Autrement dit, cette tradition révolutionnaire de la pensée radicale tient compte de l’institution même :

« Mais les pistes de Rousseau et de Platon, parce que ce sont des penseurs radicaux, conduisent au cœur du problème. Reformulons l’idée : « Celui qui veut instituer un peuple doit en changer les mœurs ». Mais qui, de fait dans l’histoire, change les mœurs des peuples ? La réponse est évidente : les peuples eux-mêmes (…) pour qu’un véritable changement des institutions soit possible, il doit s’accompagner d’un changement correspondant des mœurs tout aussi profond. »
(C. Castoriadis, Figures du pensable – Les carrefours du labyrinthe VI, Ed. Seuil, coll. « la couleur des idées », Paris, 1999, p. 137-138).

La sexualité d’un peuple, en tant que police des mœurs décryptable facilement, est la plus criante des relations anthropomorphiques suintant dans le marché aujourd’hui (le marché n’est pas une abstraction, il ne relève pas du monde idéel).

Largement, nous avons démontré combien l’aporie amoureuse est réifiée par le marché des biens et services, tout comme l’insignifiance concrète qu’est devenue une sexualité comme pure reproduction d’un retour de la grégarisation. A croire que l’évolution des sciences et des arts, de l’imaginaire et de l’ensemble de l’évolution, pour le résumer d’un mot, n’a servi à rien pour les esclaves modernes que sont nos contemporains modernisés avec leurs smartphones, leurs meufs, leurs mecs, leurs jobs, leurs joujoux technologiques et leurs insipides journaux qu’ils lisent béats et sans recul.

Bref, les hommes génériques ont presque tout obtenu dans et par la matière mais ne possèdent plus rien entre leurs deux oreilles. Régression généralisée, retour à la grotte, au feu et à la pierre ?

Saisissez-vous de la sorte pourquoi, au recours de Platon et Rousseau résumés par Castoriadis, un regard déporté de ce que nous ordonnent l’oligarchie et les médiocrates de l’insignifiance totale permet l’émancipation du prêt-à-mâcher de l’idéologie dominante.

Il est inutile de rappeler que le premier domestique du capital, l’idiot utile de cette idéologie dominante, est devenu au fil du temps le journaliste. C’est pourquoi, il revient aux critiques de ne pas sombrer dans l’amour-propre et se servir de l’expérience vécue pour dévoiler ce à quoi ils servirent sous tous les régimes. L’oligarchie gourmande, en effet volontiers mécène des choses de la pensée tournées à son service et du culte pour les informations, adore récupérer et vassaliser puis domestiquer durablement tout instrument qui pourrait servir à désaliéner le travailleur. Totale, la société se pense sous la plume ou la focale du photographe, de la caméra, du microphone...voire. Retirer les œillères consiste franchement à avouer que, ce que la presse appelle « les faits de société » ou « les questions de société » n’existent pas davantage que la colonisation de la planète par Mandarom.

Encore que la foi perdure dans nos sociétés parce que les oligarchies disposent de quantité d’agents de promotion de l’asservissement du peuple. On en trouve partout, à tous les stades, dans tous les milieux. Sachant combien les plus jeunes portent en eux des modèles de production et de reproduction de leurs maîtres, la première prescription consistant à revendiquer l’autonomie leur passe bien souvent par-dessus les oreillettes. Avec Jésus et son médiateur sur le trône de saint Pierre, « espérons ! », et ne manquons pas de croire un instant en la capacité déraisonnable, en ces temps de caserne politique bâtie par la social-démocratie, de tout être social à désaliéner sa force de réflexion.

LSR

 

 

 

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