Le langage est la première discrimination, par Patrice C.


Affaire de bobos.
Nous n'en sortirons donc jamais de ce faux débat qui tend à imputer à une pseudo classe inférieure tous les malheurs du langage tel qu'il est pratiqué et utilisé aujourd'hui, ce qui sous-tend qu'il puisse exister une classe supérieure du langage en la seule possession d'une quelconque élite ou classe au-dessus d'une autre et être le marqueur d’une pseudo intelligence ?
Il s'agit bien sûr d'un populisme langagier décomplexé, de cette façon de s'exprimer qui fit les beaux jours du langage fleuri des "fortifs" à Paris. Qui a marqué une époque où la liberté était ressentie, vécue et exprimée sur les bords de la Marne et qui fait encore aujourd'hui les délices de l'humour et le graal de chercheurs en linguistique. Les racines qui furent les nôtres doivent-elles être désormais mises au panier de l'évolution sociétale qui constitue les racines de notre présent ? Il y a toujours eu ce marquage à l'encre indélébile qui séparait nettement les "évolués", les modernes (qui n'en étaient déjà plus) et les contemporains, en fait ceux d'aujourd'hui. La transition et le glissement d'une époque sur une autre ont toujours été difficiles à intégrer (lire Louis Chevalier, Classes laborieuses et classes dangereuses, paru en 1958). Le refuge protecteur de l'ancien monde, très relatif, a toujours favorisé le conservatisme éprouvé, lieu de protection et de sauvegarde, donc rétrograde.
Il est de bon ton, aujourd'hui, de parler de populisme pour marquer sa différence d'évolution et surtout faire l'amalgame entre la condition sociale, la façon de s'exprimer d'une catégorie de la population par rapport à une autre. La discrimination sociale commence par le langage. La discrimination politique est indexée sur le parler. La faute nationale que sont les 25 % du FN lors des élections européennes vient accréditer, fort opportunément, la thèse de ceux qui avaient déjà abolis les passerelles sociétales et laissé à d'autres la responsabilité d'un discrédit européen qu'ils croyaient pouvoir vivre comme un affront personnel. La "faute" est donc clairement dans une seule catégorie de la population française. "Ce n'est pas de ma faute !" et sauve qui peut. C'est quasiment l'index tendu en direction de l'autre, d'un "autre".
Gorges chaudes sur les plateaux de télévision, où, quand même, on n'ose pas trop exprimer clairement son ressenti et appeler les choses par leur nom. Les autres, ce sont les nationalistes, les repliés sur eux-mêmes, voire les fachos… On oublie de dire, les conservateurs. Bizarre ? Oui, car conservateur, cela vous a une consonance "classieuse", réservée, un rien bourgeois et fin de royauté. Alors que populiste vous situe automatiquement dans ce que l'on appelle les "quartiers" : l'autre France, l'outre périph’ (pour les Parisiens), la zone. Des endroits où l'on ne met pas les pieds, que l'on ne connaît pas et où l'on ne connaît personne, bien sûr. On fabrique une nation à deux vitesses, et tout ce qui n'est pas "des miens" n'est pas très valorisant.
Soit, le "succès" du FN est le fait des ignares, des sans culture, de ceux à qui on a failli appartenir aussi. Le boulet n'est pas passé loin… Alors, faisons masse (un clin d'œil, bien sûr !) et enfonçons le clou : retour à une conception très milieu des années 1800, celles où l'on se délectait d'Eugène Sue : un exotisme à portée de la main ! "Continuons, voulez-vous, à faire des ronds dans l'eau du bassin des Tuileries ou du Luxembourg ?"
Plus littéralement exprimé, cela s'appelle du racisme, et le refus de l'autre ouvre en grand la porte à la grande purge !
Patrice C.

 

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