Signe des temps moroses, par Patrice C.
En passant par là.
Je suis comme les voitures : je n'ai pas toutes
les options. Notamment celle de croire béatement, de m'étonner devant le genre
humain, de rire à gorge déployée, de m'extasier devant la bêtise ou la réussite
sociale. Je n'ai pas de Rolex. Il paraît qu'à mon âge c'est un signe qui ne
trompe pas…
Pas encore tout à fait bon pour la casse (maison de retraite), je persiste à
penser, à écrire et même à m'étonner. C'est un signe de bonne santé.
L'étonnement est malheureusement plus souvent de piètre qualité et d'origine
douteuse, donc à oublier. D'autres étonnements subsistent. Ils sont cachés et
souvent liés à l'histoire qui nous a - évidemment
- précédée et qui repasse les plats à notre grand étonnement, là aussi. Oui, il
y eut des gens qui "y" pensèrent
avant… Qu'avons-nous donc fait pour ne pas les connaître tous et pour ne pas en
avoir inventés de nouveaux (des
étonnements) ?
Cette époque, décidément, n'est non seulement qu'une
pâle copie des précédentes, mais en plus, elle est triste, pauvre et dépourvue
de tout ce qui fait un enrichissement. Faute d’avoir été créatifs et riches, nous
laisserons donc aux nouvelles générations ce que nous avons trouvé dans
l'actuelle et qui ne nous appartient pas.
Pour qu'elles ne soient pas complètement desséchées,
ces "vieilleries", bien
plus vieilles que nous d'aujourd'hui, sont d'excellentes qualités. Il ne manque
en fait que les hommes et les femmes qui les ont "inventées". La qualité de leur travail est à l'image de ce
qu'ils (elles) furent : d'excellente
qualité. Les époques dominées par les événements graves ont été propices pour
cela. Il fallait sauvegarder, dans l'urgence, ce qui pouvait l'être et donc
emmagasiner. Nous, nous ne laisserons que le gris de la couleur du béton et le
noir de celui du bitume. Il ne subsistera que des séquelles de vie et
d'existence. Les tracas contemporains feront - tout au plus - tache d'huile, de celle que l'on autoproduit.
Le peu de saveur que nous aurons inculqué à cette période
aura pour nom pollution et mépris. Historiquement, à défaut d'événements graves
et c'est heureux, nous ne laisserons rien d'autre qu'un vaste trou noir
d'inexistence. On pourrait dire un "blanc"
dans le déroulé de l'histoire. Qui osera, en dehors des historiens dont c'est
le métier, le mérite et la patience, réveiller des noms, de vagues souvenirs,
et la non-histoire qui allait avec ces noms-là ? Depuis quand exactement
n'avons-nous pas "marqué"
l'Histoire, de nos faits et gestes et de nos hommes et femmes ? Il y eut,
ce serait dommage de l'oublier à une époque aussi désertique en dires et faits
remarquables, des moments de grande intensité qui, d'ailleurs, ne furent pas
également partagés, tel que l'abolition de la peine de mort. De consensus, nous
n'en avons pas connu. L'adversité des événements ne le nécessitait pas.
L'instant n'était pas assez grave. Finalement, depuis la Première Guerre
mondiale, relancée par la Seconde, nous n'aurons pas fait l'Histoire. Elle se
sera faite toute seule, au gré du temps qui passe sans laisser de trace. Quant
à parler des hommes et femmes qui auraient dû soutenir notre passage, rendons
grâce à quelques chercheurs. N'espérons rien des hommes et femmes politiques
qui dévoile que, depuis la défaite française de 1918 qui nous trouva et nous
mit dans la même situation que "l'ennemi",
leur parcours n'aura marqué ni le souvenir et encore moins l'Histoire. Il nous
faudra attendre la fin sans même l'espoir de voir autre chose que la misère
institutionnelle et représentative.
Aux suivants !
Patrice C.
Commentaires
Enregistrer un commentaire