Asbo et Beauf dans un bateau


Des laids et des Beaufs.

Comparaison de deux états de l’esprit divergents (Grande-Bretagne / France).

 
Le cygne, à Londres, est le totem très respecté de la Queen
L’écrivain britannique Martin Amis a des penchants pour la superbe. Il rejoint l’universalité quand il abreuve son lecteur d’images piquantes, de dérisions et de remarques si fines qu’on en allumerait un cierge pour des pages de vertus en plein vent. Pour lui, il y a une figure singulière, propre au Royaume-Uni concentrée dans la figure d’Asbo. Amis, Gallois de naissance en 1949, sait combien, en traquant les petits personnages, il peut se dénicher un état de l’esprit d’un pays propre, des traits qui déterminent les vues d’un peuple. Et donc de ses gouvernants. Dans son dernier opus, il dépeint donc un héros qui n’est pas le Beauf, Français par excellence. Il s’en distingue radicalement. Pourquoi ?

Dans Lionel Asbo, l'état de l'Angleterre (2012 ; Ed. Gallimard, 2013 pour la trad. française). Amis se confie sur son personnage : « Asbo est un concentré de comportement typiquement anglais. Il fait partie de ces laids que j'ai souvent rencontrés. Ce sont des individus drôles, malins, expressifs mais, de manière tragique, ils estiment que l'intelligence leur est néfaste et finissent par adorer devenir stupides, brutaux et déplaisants. En Angleterre, il y a cette très vieille tradition : priorité à la vulgarité ! ».

En quoi Asbo se distingue-t-il du Beauf franchouillard ?

En premier lieu, le Beauf est typiquement français. Il a l’esprit de sérieux avec et en lui. Pour toujours. Et il l’étale sans frémir. Jamais il ne s’en départit. Il est sûr de lui, sûr de son savoir-faire, persuadé d’être plus fort et intelligent que tous les autres, qu’il soit chasseur, caporal d’armée, ministre ou tout autre fonction professionnelle qu’il incarne bellement dans une attitude humaine, trop humaine. L’Asbo britannique, nous confie Amis, est quant à lui persuadé que « l’intelligence [lui] est néfaste ». Les laids de France sont parfois très beaux… eh, oui, le Français est beau naturellement, contrairement à l’Anglais. Mais sa laideur réside avant tout dans sa morale aux petits oignons pollueurs, dans ses comportements en société, ses fatuités concrètes souvent déployées dans une vie publique insincère. Ils ne sont pas drôles, ils le deviennent quand on les observe de près. En revanche, ils sont tout autant expressifs et malins que les Asbo d’Albion.

En second lieu, le Beauf ne cherche pas à se présenter comme un être vulgaire. Au contraire, il est le premier à vouloir en réchapper. Ce sont ses comportements et attitudes personnels qui le sont : il jette ses ordures partout où il passe, gifle ses enfants pour des peccadilles mais leur autorise toutes les breloques évanescentes, s’affuble du rôle princier de serviteur de l’Etat, du Parlement ou d’une collectivité territoriale sans vision, sans saveur par une parfaite vulgarité d’étalage de soi, de ses pouvoirs symboliques, de son mépris de classe et des canons de la culture. En résumé, le Beauf aime à salir ce qu'il travaille, ce qu'il touche et les endroits qu'il fréquente quand l'Asbo entend, lui,  détourner l'attention pour rester en père peinard aux frontières de la vacuité du conformisme de la vie sociale.

De là à en tirer des traits significatifs… Il convient d’en rester aux personnages, fictifs ou vrais, et détrousser de la sorte les morales de sous-sol ferrugineux. A grands éclats du rire de de l’hébété inutile.

LSR

 

 

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