Promettre et ses conséquences


Origines des ardeurs de la promesse.

Dans les palais parisiens du pouvoir, on se pose beaucoup de questions. « Fait-il l’affaire, ira-t-il au bout de son mandat ? ». L’interrogation est légitime. Elle est pourtant inepte. Sauf crise institutionnelle majeure (elle est toujours possible avec des amateurs), il ira jusqu’au bout et boira sa coupe d’amertume jusqu’à la lie. Un de ses alliés du second tour de l’élection de 2012 avance qu’il n’avait osé imaginer à quel point il avait menti. La promesse, comme dans toute union, est une condition pour exister en société, ou faire de la politique. Elle tient principalement de l’engagement comme condition principale du pacta sunt servanda, locution selon lequel tout contrat conclu entre des parties doit être respecté. Les contrats moraux entre deux individus et les contrats politiques sont certainement les plus compromettants à ne jamais les respecter.

Pour Nietzsche, principalement dans Généalogie de la morale (1887), cette règle est la mère de toutes les normes pour assagir les actions collectives.

Le progrès moral de l’humanité peut être une promesse que l’on ne respecte pas. Une promesse peut porter sur la promesse immorale à respecter. En politique concrète, le premier à l’évoquer de telle sorte, Machiavel conseille au prince de recalculer une promesse, de ne pas y céder. Les casuistes (religieux généralement placés sous la domination d’Ignace de Loyola) défendent par restriction mentale l’idée que l’on peut ne pas s’engager à suivre une promesse morale sous l’injonction de deux mouvements successifs : si un performatif est évoqué, d’abord, si la promesse résiste à toute stratégie de retournement, ensuite.

Par leur interprétation du Nouveau Testament, malgré des distinctions, pour saint Augustin et saint Thomas il est nécessaire de respecter l’engagement même avec ceux qui se situent à l’aune d’une autre forme, même fondée sur le mensonge. Ici, le progrès moral relève d’une projection progressive.

La promesse demeure une décision et elle résiste au mensonge. Normalement pour les contractants de bonne foi. Le pacta sunt servanda appartient à l’interception commune de toutes les pensées morales et toutes les cultures de l’humanité. Montaigne défend radicalement la règle. Il s’agit pour lui de respecter la fidélité à la foi et soutient que, même face à l’obligation d’un brigand, il faut rester fidèle à sa promesse. Certes, le problème du mal est partout chez Montaigne. Inspiré par lui, Nietzsche, dans Par-delà bien et mal (1886), orchestre la défense de la promesse. A compter du XVIIIe siècle, David Hume, qui inspire la plupart de ses successeurs politistes et économistes, commet un éloge de l’Etat de la manière suivante : au vu de la multiplicité, il doit y avoir une instance étatique capable de surveiller les autres.

Enfin, la question de la promesse en politique est au cœur du dilemme contemporain avec le régime représentatif qui soulève toutes les questions relatives aux crises. Et tout l’édifice de la démocratie branle sur ses bases en la matière. Voilà bouclée la spirale d’une descente dans les flammes et turpitudes de nos gouvernants qui ne font que gérer plutôt médiocrement les crises successives qu’ils essuient. Crises politiques, crises économiques – dont on ne dira jamais qu’elles sont intrinsèques au régime choisi -, crises morales, crises, crises, krisis perpétuelle… la hauteur de vue vient à manquer, la persistance de la cécité ne manque pas, elle, et c’est tout le sens que prend l’extrême danger du mensonge récurrent en politique : il façonne les périls historiques.

LSR

 

 

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