La marée verte de la presse en goguette, par Patrice
Dans la série "La presse
est inénarrable", suite.
Et certainement pas fin…
C'est ainsi qu'en ce dimanche de mars que l'on veut
avant tout responsable politiquement, la presse nous rebat les oreilles avec…
la marée du siècle ! Il faut le faire ! Imaginons quelques centaines
de milliers de Français courant vers les côtes de la Manche et de l'Atlantique
pour voir… des vagues !
Bien sûr, moi, je suis natif du bord de mer, alors vous
pensez, les vagues… C'est le propre de la mer, les vagues ! A chaque coup
de tabac, d'un vent un peu sévère, les vagues, elles vous pètent au nez. Marée
du siècle ou pas, un vent à 120-140 km/h et vous voilà servis. Des creux de
douze mètres, c'est monnaie courante. Doivent bien rigoler les habitants de
Mers-les-Bains, Dieppe, Le Tréport, Saint-Malo et autres Crotoy ! Voir
arriver des armées de zombies en quête d'émotions fortes… « Viens, chéri, voir la mer déchaînée ! ».
En fait, c’est plutôt la chérie qu’il voudrait voir
déchaînée… Le local qui entend ça, il se gondole de rire ! Bref, un
aller-retour Paris—Saint-Malo par autoroute, deux nuits d'hôtel, quatre repas
au resto (pour deux personnes), ça
vous met un coup d'œil improbable sur les turpitudes de la nature à quelques
six cents euros. Finalement, ça va pas si mal que ça en France… Si vous ajoutez
à la marée du siècle (qui n'en fut pas
une), les éclipses du soleil, aurores boréales et chasses aux cyclones, on
se dit que les Français ont de quoi faire et qu'en plus ils le font (financièrement). Pas si grave finalement
la situation…
Par ailleurs, week-end éminemment riche et pas toujours
en émotions quoique, il y a des élections. Là, ça fait un plouf. Ça sonne
creux, ça ne rebondit pas. Ça fait même un plat, un vent qui passe. « Ah bon ? ». Et c'est là
que la presse suit son idée : être sur le coup. Après la nature qu'elle
vous a vendue comme étant en furie, vient la nature citoyenne. « Là, Coco, faut être positif ! La presse
est là pour apporter des réponses, pas des questions. — Bien, chef ! ».
Dans la famille positive il y a l'annonce, à longueur
de bulletin, du taux de participation. C'est sensé être une info. Même lorsque
l'info en question n'est plus qu'accessoire au vu de ce qu’est l'abstention.
Pas de problème, on va d'abord vous parler de ce qui est secondaire avant de
vous parler de l'essentiel. Soyons positifs : « A la mi-journée, le taux de participation est de 18% ! ».
L'info est, bien sûr, que le taux d'abstention est,
lui, de 82 % ! Une paille ! Mais, vaille que vaille, on fait
positif. C'est un peu comme si on vous annonçait qu'à Tunis il y a eu trois
morts Français et qu'on escamotait les 19 autres tués. Ou comment être positif
dans la presse… En même temps, ça rend service au ministère de l'Intérieur (on n'est jamais trop bien avec l'Intérieur…)
qui fait lui aussi dans le positif à tout crin (« Les Français sont des citoyens responsables » ,
etc., etc.).
C'est pas fini ! De relais en relais, la presse
existe… Après donc une vraie-fausse marée du siècle, des élections quasi inexistantes
en positif et tout en négatif, on enchaîne sur la circulation alternée de
demain en région parisienne, lundi. Après six jours de pollution intensive (depuis mardi), l'Etat vous promet qu'il
va agir ! Belle performance ! Six jours pour dépatouiller des
règlements en tout genre, dénier aux départements et communes concernées le
droit de se protéger, le Grand Aguamemnon se réveille et agit ! Il sort de
sa léthargie politico-sociale, et il décide ! Wouah ! Quel souffle, quelle énergie, quel courage ! Il
décide que demain, où cela devrait commencer à s'arranger pour nos bronches, il
agit…
Heureusement que ce n'est pas nucléaire, on serait déjà
tous morts ! Demain, donc, les "tomobilistes"
franciliens vont enrager… Une jouissance de voir ça ! L'Etat n'allait
quand même pas nous la faire avant une élection qui s'annonçait calamiteuse.
Non, il nous la fait le jour du scrutin : dernière cartouche avant
l'hallali.
Finalement, elle a eu du grain à moudre, la presse.
Pendant trois jours consécutifs. Pas pour le mieux, juste pour exister.
Patrice C.
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