Des délirantes participations des lecteurs à Médiapart, par Patrice
Le partage communautaire de la
presse.
La presse participative comme valeur d'une nouvelle
façon d'informer, d'être près du lecteur et de lui fournir l’opportunité de s’exprimer
est-elle possible ?
Suite au propos de Médiapart
de vouloir associer le lectorat à la vie d'un organe de presse, on se demande
si ce n'est pas aussi ouvrir la porte à l’expression de toutes les
récriminations et colères de ceux qui aspirent à prendre la parole sans savoir
exactement qu'en faire. Si l'idée est hautement démocratique, on sait déjà par
la lecture du courrier des lecteurs dont s'ornent certains journaux que cela
n'a de participatif que son aspect et que celui-ci reste cosmétique dans l'idée
d'un débat suivi et constructif. Contrairement à ce qui se fait déjà sur
papier, et qui implique une tricherie tant les courriers adressés sont
sélectionnés, triés et choisis selon des critères abscons pour le lecteur et
qui relèvent non seulement d'une hypocrisie de fait mais aussi de paramètres
techniques, de place et de mise en page, autant par internet cela ne
demande-t-il qu'à devenir un flux continu (interactif)
et sans barrière mais qui peut se transformer rapidement en un train
d’intolérances.
Ouvrir un espace médiatique, donner la possibilité
d'exprimer des avis, idées et analyses peut être parfaitement constructif et
profitable intellectuellement et démocratiquement. Mettre en jachère un espace
et le laisser à disposition des réactions suscitées par le contenu initial d’un
journal, cela se transforme rapidement en gabegie à la fois de l'espace bien
qu'illimité sur internet et de l'intérêt sérié de près de la ligne éditoriale
et ouvre inévitablement la porte aux donneurs de leçon et pseudo détenteurs de
vérité. La presse n’a pas vocation, que je sache, à avoir raison quelle que
soit sa forme et le contenu de son expression.
L’ouverture de l’espace presse peut-il être profitable
aux lecteurs ? Ceux-ci ne risquent-ils pas de se voir confrontés à plus de
réflexions "parasites",
émanant d’opportunistes au long cours ou de circonstance, que profitables au
développement d’un contenu ? On ne peut malheureusement présumer de rien
et, force est de constater que l'on a dû attendre au moins deux ans avant de
constater dans quel guêpier s'était fourré Edwy Plenel et son équipe. Le
déballage incontrôlé (ou presque) des
propos tenus, pour peu profitable qu'il soit, tend à appauvrir le débat entre
les lecteurs et à égarer ceux-ci dans des méandres quelquefois peu ragoûtants
ou suspects. Le résultat peut déboucher sur la lassitude et le désappointement
de ceux qui viennent là pour parfaire des connaissances ou des idées, et finira
inévitablement par les éloigner du journal qui sera devenu sans grand intérêt
pour eux, ce qui peut avoir pour conséquence pour le titre tutélaire de devoir renouveler
une partie de son lectorat. Le partage oui, la chienlit non. On a connu telle
aventure avec France-Soir qui fut,
jusqu'au début des années 1970, le grand quotidien que l'on sait tant au
national qu'à l'international et qui, par souci de sauvegarder son lectorat, s'enlisa
dans des démarches contre-productives à trop vouloir le conserver. Décourager le lecteur ou lui compliquer la
lecture (il ne faut pas négliger que
celui-ci est paresseux et vénal), c'est le perdre. Le confronter à des
flots écrits plus ou moins délirants ou mégalo, c'est l'asphyxier.
La confrontation supposée des points de vue et des
idées ne débouche que très peu souvent sur quelque chose de constructif tant le
paraître l'emporte sur l'être propre de l'individu. Il suffit de voir que, sous
couvert d'anonymat, certains deviennent plus "célèbres" qu’ils le seraient sous leur patronyme et ne se
cachent qu'à peine de s'en faire une gloire. Ça se soigne !
Actuellement, seule la colonne des invités de Médiapart apporte ce que l'on était
censé en attendre. Il s'agit de thèmes divers et variés qui apportent quelque
chose de complémentaire à la rédaction. C'est la seule fenêtre ouverte sur une
participation extérieure intéressante, à la condition de se passer (une fois encore) de lire les
commentaires générés où l'on retombe trop souvent dans les mêmes travers que
pour le fond rédactionnel, la volonté hégémonique des uns et leur intolérance
recouvrant le simple bon sens et la saine curiosité.
Le partage, tout souhaitable qu'il soit car facteur de
complémentarité et d'enrichissement, n'en reste pas moins difficile à mettre en
œuvre lorsqu'il s'agit de respect réciproque.
Patrice C.
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