La liberté sur internet : une promesse irréalisable. L'autre guerre, par Patrice


La liberté est un bien commun.

La guerre de tous contre tous, relevée par Christopher Lasch, bat son plein sur la Toile, ainsi rebaptisée d'internet. Conformément à son analyse, il s'agit bien d'opposition socialement constituée menant à l'indifférence d'abord, puis à la guerre, à défaut de trouver un terrain consensuel d'entente et de compréhension réciproque. Les différences se regroupent pour mieux agir à leur guise, pour créer des puissances dominantes. Elles s’attribuent le pouvoir de décider ce qui fait consensus ou ce qui est étranger.

Ainsi, on coupe court à toute tentative de réflexion communautaire et consensuelle. On refuse à "l'autre" son droit premier à partager, pourtant inscrit dans un ensemble reconnu et collectif qui s’appelle la liberté, s’il est différent. On s'érige en juge qui se veut de bonne volonté (!) (ça ne mange pas de pain et ça donne bonne conscience) dominé par le subjectivisme de groupe qui devient la règle et l'alibi dérogatoire au droit commun premier, quitte à aller jusqu’au laxisme. Il n'y a plus de place pour la différence érigée en droit particulier et donc forcément étranger. Toute tentative de "recoller au peloton" est vaine. Le droit individuel, bien qu’inscrit dans une communauté politique, n’existe plus. Ce que l'on appelle fièrement le droit à la différence n'est en fait que le droit de se différencier égoïstement, mais en groupe. Ne vous avisez pas de prétendre que trop de liberté tue la liberté ! Malheureux, vous seriez irrémédiablement traité de facho, d'élitiste, donc de sectaire car vous seriez le seul ! On ne touche pas à ce qui fait consensus majoritaire, fût-il subjectif.

Prétendre que la liberté est un pot commun où chacun peut puiser la quantité dont il a besoin est hors sujet. Ce pot commun est en fait un terrain de guerre où chacun fait ce qu'il veut, se sert comme il veut, à sa convenance, mais en meute. Les besoins particuliers n’existent plus. Imaginez un pot de confiture (de fraises, tiens !). Vous prétendez que la confiture est sucrée. D'autres prétendront qu'elle est amère. Ne leur refusez pas ce droit, vous seriez un affreux dictateur au prétexte que chacun peut penser ce qu'il veut de la confiture en question, surtout si l’autre est pluriel. Sinon il y a entrave à jouissance et à la nouvelle règle collective qui entend définir la liberté de chacun ! Sur la route, la circulation en France se fait à droite, la liberté de chacun serait de faire ce qu'il lui plait. Imaginez qu'il y ait des gens pour rouler à gauche… C'est interdit ! Obstruction à la liberté ! En fait, c’est surtout déraisonnable et abusif de la liberté commune.

Nous en sommes là ! La conformité s'habille en subjectif. La communauté n'existe plus. La guerre est ouverte. Premier arrivé, premier servi ! Il vous faut appartenir à une chapelle, à une religion (elles font florès). Seul, vous n'êtes rien ! Différent, vous gênez ! Vos propos mêmes ne sont plus reconnus comme conformes à l'étalon-or de la différence égoïste mais majoritaire. La diversité se fait plurielle et consensuelle, mais dans une subjectivité partagée.

La mise à disposition d'un espace comme internet est à la fois géniale et trop généreuse. Voyez ce que cela amène comme abus… Au final, une auberge espagnole où l'on ne trouve que ce que l'on amène. Au mieux un endroit où l'on retrouve les siens. Finalement, on fait machine arrière, on reste dans son jardin, avec ses semblables.

L'homme est-il mûr pour exploiter une liberté totale, au sens anarchiste et individuel du terme ? Avant cela, la liberté, il faut la construire, l'ériger et savoir jusqu'où elle peut aller. La liberté a aussi ses règles. Imagine-t-on un espace infini, inépuisable, vierge ? Toute vie comporte des limites et des règles, celles de l'entendement individuel mais partagé.

Toutes les valeurs ont leur contraire. Soumises au subjectivisme de groupe, elles deviennent religion, croyance nouvelle, binaire, simpliste, dictatoriale. Ne marchez pas en dehors des clous de la bien-pensance érigée en valeur nouvelle ! Toute discussion devient guerre de persuasion, d'influence, de position. L'intolérance prend le pouvoir dans les esprits, subrepticement mais vaillamment. Tout sujet devient d'abord objet de catégorisation, de classement et d'opprobre. A quand les martiens inclassables, donc suspects ? Tous ces gens participent pourtant d'une seule et même liberté. Celle qui a un L majuscule, qui est unique mais commune n'en déplaise aux nouveaux égoïstes collectivistes.

Il s'agit bien d'une guerre. Lasch avait raison.

LSR

 

 

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