L'autoritarisme de la "liberté 2.0", par Patrice


Main basse sur la liberté.

La liberté est la chose la plus vénérée par l'homme. A juste titre, car on sait ce qu'il en est de ne pouvoir en disposer. Elle est un bien commun dont chacun peut disposer et où chacun vient puiser à sa guise, mais selon les règles de la vie en collectivité. La modernité de l'époque la malmène cependant comme peut-être jamais elle ne l'a été, de façon agressive et pernicieuse.

La technologie telle qu'elle est consommée et utilisée est en fait une menace pour la liberté. C'est en son nom que l'on s'imagine que tout est permis, y compris le pire. La réserve qui est due à son utilisation afin qu'elle conserve toute sa saveur, n'existe plus guère. La liberté est galvaudée, mise en libre service et potentiellement dépréciée comme un vulgaire produit de consommation courante. Tellement courante qu'elle n'existe plus que de façon tristement anecdotique : "Je suis libre de faire ce que je veux !", tant et tant entendu en toutes circonstances, en fait une non explication à toute chose par ailleurs souvent illégales ou attentatoires à la vie commune.

Ces technologies qui se veulent et se disent de liberté n'ont en fait que l'aspect technique pour cela. L'utilisation reste question individuelle, de bon sens, de partage et de respect réciproque. Il s'en faut de beaucoup. Les individus étant devenus étrangers l'un à l'autre dans les sociétés dites modernes, bien avant l'avènement de ce qu'il a été nécessaire de leur octroyer pour que la vie et la planète ne deviennent pas invivables. D'où l'utilisation devenue civile de technique militaire comme internet, car il vaut mieux sacrifier quelque chose de réservé (on en a d'autres) plutôt que de courir à l'affrontement planétaire, surtout après l'abandon des thèses politiques bipolaires. En fait : un os à ronger sur lequel se sont jetées goulûment des entreprises mandatées et commanditées pour organiser leurs affaires et par là même le calme. Celui-ci, une fois planifié et contrôlé, on pouvait marquer une pause et respirer un peu sur le front de la société planétaire devenue bancale. Celle-ci allait pouvoir éponger ses velléités en vase clos et sans grand risque majeur pour la paix mondiale.

La mainmise sur un espace de liberté par des groupes constitués est attentatoire à la liberté commune et globale. Elle est constitutive de forces actives en vue d'occuper et de s'attribuer, de monopoliser l'espace collectif à des fins partisanes et sectaires. Après étalage outrancier de valeurs individuelles, un consensus se créé et permet le regroupement de thèses et d'affinités qui ne sont compatibles que dans la dimension superficielle. Des communautés se créent et se multiplient selon des paramètres qui se veulent tous plus rassurants les uns que les autres. L'espace ouvert au dialogue et à la liberté s'avère vite être un champ clos d'où plus rien ne sort qui ne soit profitable au plus grand nombre mais juste à ses affidés. Une stérilité s'impose.

La liberté dans tout ça ? Elle a disparu des ambitions et des espoirs. Les intérêts sont fragmentés et la liberté d'expression devient juste une liberté d'être, d'exister, proportionnelle et relative à l'ensemble des groupes constitués. De communication hors les nouveaux murs érigés il n'est plus question, trop heureux d'être enfin (!) entre soi. Les interpénétrations et tentatives de communiquer avec l'extérieur se trouvent vite anéanties tant elles se révèlent impuissantes et le système touche ainsi une nouvelle fois à sa fin, la même qui l'avait déjà vu naître.

Tout réseau social, ainsi baptisé pour adoucir ce qui est sa finalité faite de domination, et depuis récupéré par le mercantilisme, n'a en fait comme fonction que de différer l'entente, le partage vrai du bien commun qu'est la liberté et d'entretenir sous une forme "moderne" le non droit à la différence individuelle. Désormais, les collectifs sont communautaristes et donc sectaires et exclusifs. Le plus grand nombre de participants devient la preuve de sa puissance et de son bon droit face à d'autres groupes.

Celui qui se présente comme non participant est ostracisé et mis à l'index. L'individu en tant que personne ne compte plus dans la liberté 2.0. Seuls les groupes sont représentatifs et ont force de représentation. Sauf à trouver un système qui permette une nouvelle cohabitation avec ces différences érigées en valeurs absolues, à l'éthique dominatrice et improbable, le monde se prépare des lendemains qui risquent bien de ressembler furieusement à ce qu'il a déjà connu au XXe siècle. Ce sera, une fois encore la liberté qui pâtira et qui sera retirée aux hommes.

Patrice C.

 

 

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