Quand la télévision sert le spectaculaire-marchand de la gauche morale
Pourquoi en
rire ?
C’est dingue, les émissions de
divertissement à la télé se transforment en mielleux débats politiques. L’autre
soir, par curiosité, j’ai regardé Mme Taubira face à deux putatifs contradicteurs
de profession. C’était l’annonce.
En fait, j’ai assisté à une
succession de mots creux, de grandes sentences, de grandes professions de foi
et principes à peu de frais. On est ému quand il faut, on rit quand l’animateur
rit, on applaudit à tout rompre. C’est le triomphe de la pitrerie mercantile
servie un samedi soir, avec deux marchands de sommeil très représentatifs de ce
que la presse visible est : une boîte d’échangisme avec les grands de ce
monde, politiques, chanteurs, écrivains, rockers, artistes, comédiens et gens « qui font le buzz » instantané.
La télévision mélange tout, ça ne
date pas d’hier. Divertissements, politique, débats, prestidigitation sur tous
les angles, charité… L’argent coule. C’est l’essentiel. Produire une émission
coûte, elle doit donc rapporter auprès des annonceurs. Surtout, le commerce du
conformisme généralisé doit l’emporter sur tout le reste. Il s’agit de faire
tourner la boutique, de participer, peu ou prou, consciemment ou inconsciemment
au maintien du système social, de la bluette politique qui permet de baliser
toutes les pulsions des agents sociaux.
La télévision a ceci de merveilleux
qu’elle rend caduque la lecture et la recherche personnelle, nécessitant une
part d’ombre dans l’effort. Un livre, à la télévision, soit il vend bien une
identité, soit il emporte un sentiment. Il est surtout le prétexte de la culture
dans le divertissement.
Les invités politiques connaissent
toutes les ficelles, de l’attendrissement à la provocation pour exister, se
faire valoir, augmenter son capital symbolique et communiquer sur leurs
personnes. « Vu à la télé » sert l’élu local ou national retiré
momentanément du grand brushing compassionnel de l’Assemblée nationale. Une
parole rare est encore une parole, alors on crée l’événement en permanence. Les
grimaces de Madame le garde des Sceaux ce samedi montrent la maîtrise parfaite
qu’elle possède de ce lieu d’aisance. Il lui sert autant à sa notoriété, à l’édification
de sa légende télévisuelle (la télé
suscite son histoire, propose d’être l’histoire elle-même), à se maintenir
en poste parmi ses collègues-adversaires du gouvernement. En même temps, la
télévision lui octroie le moyen de faire croire au bon moment qu’au sein du
gouvernement Valls, elle serait la carte de gauche, la personnalité intouchable
parmi les égéries consensuelles de la gauche des principes moraux.
Désastreux que tout cela. La politique
est réduite à son utilitarisme fonctionnel : tenir les barrières, gronder
les foules au son du régalisme d’Etat. Rien ni personne n’a de chance de percer
les digues s’il ne connaît pas un minimum les codes publics en la matière. La
télévision démissionne dans l’idée de rendre service au public, d’élever son
niveau général culturel ou en termes d’informations et éducations. Elle participe
à la déliquescence de l’état politique et social de la France, en laissant
croire que tout est une question de volonté et de programmes cohérents présentés
pas une majorité cohérente… un programme divertissant, mesdames, messieurs. Du spectacle.
Pur et simple spectacle. Qui dirige quoi ?
Mais le rire, mon ami, le rire qui
se joue de tout et de tous !
Le Serpent rouge
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