A la radio, à la télé, la vie féconde du néo-journalisme
Ouf, vivement le foot pour secouer les ondes
L’info est
morose en ce mois de mai. Elle tourne en rond. Dans les « matinales » radiophoniques, on ne
sent pas l’enthousiasme habituel, les longues séquences sur le « fait du jour » qui appellent
débatteurs, experts, « parole aux
auditeurs » et retour le soir même sur le débat du matin. Bref, cette
dose d’agitation surexcitée sur un seul front dans tout un studio, dans des
rédactions où le terrain reste borné par les Maréchaux.
La réserve généralisée
serait-elle la conséquence des ponts et congés du mois des équipes
rédactionnelles ? Les élections européennes dans les Etats-membres
mobiliseraient-elles intensément les journalistes ? L’attente du Mondial ?
Cannes ? Le marché des stars du micro pour la prochaine rentrée de
septembre ?
De plus en
plus, les personnels des rédactions ont saisi que des incises longues, faisant
du buzz sur un seul événement
tournant en boucle toute la journée ne fait pas forcément recette. L’affaire
Gayet/homme casqué, l’affaire Bygmalion, autant de faits épinglés, entre une
guerre, un meurtre à Marseille et un médicament, ont été proposés jusqu’à l’overdose
au détriment de tout le reste. La presse papier glacé n’est pas en reste. Mais comme
tout est dit à la radio, tout est vu à la télé, où sont les lecteurs qui
éprouvent le besoin d’aller s’en reprendre une dose entre deux pages d’une publicité
incompréhensible ? Presque personne. De moins en moins, surtout. Ce sont
les chiffres de l’OJD et les tarifs des pages pubs qui font la tête.
Une presse
qui marche sur l’encre est une presse qui perd son crédit. Les rédactions des
grandes stations radios périphériques font donc dans le mou, la largesse, la
timidité. Voire un étrange mixage entre réserve et sarcasmes sur l’actualité.
Seules tentatives de faire un peu service aux auditeurs, l’élection de dimanche
prochain. Rtl, France Inter, Europe 1 cherchent un souffle printanier. D'où le refrain tous les jours de "l'info exclusive de la rédaction de..." sur tout sujet, sans hiérarchie, sans analyse en amont... France Culture,
Rmc, France Infos conservent leurs lignes respectives. Un candidat ou ancien
candidat à la présidentielle pourrait quand même faire un effort pour se faire
mettre en examen, histoire de dépoitrailler sur la gravité de la crise
politique, sur le populisme à nos portes, le fascisme dans nos popotes.
Pendant ce
temps, on voudrait nous faire croire que le cœur de l’année journalistique se
trouvera prochainement au Brésil. Tous les jours, on soupera d’anecdotes sur la
vie interne des Bleus, les commentaires sur les matchs, chacun des consultants
et journalistes endossant le maillot de sélectionneur. Et ça commence déjà. Les
communicants et pubards ont tout compris de leur métier. Une page de réclame
télévisée relève en ce moment un bon père de famille endormi depuis quatre ans,
maillot des bleus sur le dos, la barbe et les cheveux à la Chabal qui descend
de son lit, se rase, se lave et va reprendre place devant sa télévision devant
des enfants et une épouse accoutumés à cette situation « normale ». C’est d’autant bien
trouvé, d’autant plus drôle que nos professionnels de la communication
décrivent en fait là leur propre condition ou leur désir secret pour le bon
peuple. Le foot, ça, c’est pas morose,
une machine à cash direct et pendant
des semaines et des semaines pour les médias.
LSR
Une bonne illustration de l'homme selon les désirs secrets de pas mal de communicants (Barbizon, 2013) |
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